Pas facile de reprendre une auberge autrefois tenue par Pascal Cothet, dynamique chef et Portneuvois d’adoption qui s’était donné pour mission de promouvoir les saveurs de sa belle région. Un couple a pourtant fait le saut, muni d’un parachute non négligeable: la cuisinière de l’ère Cothet toujours aux fourneaux, et les recettes de leur prédécesseur en cadeau. On n’allait donc pas être trop dépaysés!
On ne l’a certes pas été par le service, chaleureux au possible. Animés d’un enthousiasme sincère, les nouveaux proprios mettent les bouchées doubles pour nous faire passer un bon moment. Sur la table, de gentilles attentions: bouquet de fleurs coupées, pichet d’eau citronnée… J’aime.
Au menu, des plats où les produits (majoritairement portneuvois et québécois) prennent la place qui leur revient, escortés de sauces et d’accompagnements qui jouent bien leur rôle de faire-valoir. À preuve, ces amuse-bouche où un fromage Cendrillon d’Alexis de Portneuf est sur le point de fondre sur un croûton et un confit d’oignons tout doux. J’en engouffre un en admirant le magnifique terrain derrière l’auberge champêtre, qui déroule son tapis vert jusqu’à la rivière Sainte-Anne, au pied de montagnes émeraude. Il faudra revenir en été pour profiter de la véranda (et du menu estival, dès le 15 juin).
David, mes parents et moi avons tous pris le menu cinq services. Tant qu’à se déplacer… Ma mère et moi passons vite à travers notre crème brûlée au foie gras, dont la croûte caramélisée contrebalance le goût beurré du foie gras. Bel accompagnement que ces longs et épais craquelins multigrains très craquants. Divinement tendres sous la dent, les ris de veau poêlés de David baignent dans une sauce crémeuse aux citrons confits, coriandre, pastis et vin blanc. Un mariage des plus rafraîchissants. Mon père, lui, savoure en opinant du bonnet son filet de saumon sauce à la moutarde de Meaux sur lit de patates douces. La barre est haute pour la suite, qui se présente sous forme de verdurette, sauf pour moi qui ai choisi le potage épicé aux carottes. J’ai bien fait. Il est d’une incroyable onctuosité et fleure bon la muscade. Seul hic: il est servi trop chaud.
C’est aussi le problème du vin, d’ailleurs, dans ce cas-ci un Château des Laurets (Puisseguin Saint-Émilion). Ai-je bien vu? Il est conservé dans une armoire? Il faudra remédier à cela. Côté plats principaux, de belles surprises. Le doré a été juste saisi dans la poêle, et est coiffé d’un "souvenir de chèvre doux" (quelle jolie expression!). Si on goûte d’abord le fromage, la saveur du poisson revient habilement à la charge en finale. Bravo aussi à l’étagé de boeuf, un steak juteux déposé sur de petits oignons poêlés et une purée de pommes de terre parfumée à l’huile de truffe. Malheur à moi, seul mon plat s’est révélé un peu décevant. Une cuisse de lapin farcie, c’était. Savoureuse, fondante, mais trop… farcie. Surtout que le goût sucré de la farce s’acoquinait moyennement avec la réduction aux tomates séchées. J’ai donc mangé ce qu’il y avait de chair, sans oublier les pommes de terre rissolées, ainsi que les asperges et les carottes bien croquantes.
En dignes bibittes à sucre que nous sommes, nous avons tâté des desserts même si notre ventre demandait grâce. Le meilleur de tous: des pommes poêlées au sirop d’érable, auxquelles se mêlaient du mascarpone et quelques noisettes cristallisées. Le tout servi dans une petite casserole en cuivre. Délectable et adorable.
Emballant /
L’habile mise en valeur des produits, la finesse des plats.
Décevant /
Le rouge servi température pièce, et la carte des vins en général, qui pourrait être bonifiée.
Combien? /
Pour trois services, pour deux personnes, 80$ le soir, 30$ le midi (excluant boissons, taxes et pourboire).
Quand? /
Du mercredi au dimanche, pour le dîner et le souper. Déjeuners la fin de semaine.
Où? /
La Bastide
567, rue Saint-Joseph
Saint-Raymond
418 337-3796
www.bastide.ca