Restos / Bars

Rien ne vaut le gelato : Dolce vita

L’Italie a légué de nombreux trésors de gourmandise aux gastronomes du monde entier. Mais pour rendre la vie plus douce, rien ne vaut le gelato. Voici quelques moments de bonheur à partager, découverts dans une gelateria près de chez vous.

Enfants, notre tête arrivait juste à la hauteur du comptoir. Les yeux rivés sur les dômes crémeux multicolores, on étudiait les parfums avec sérieux. Pistache, fraise, noisette, chocolat, citron… et deux boules seulement à sélectionner parmi tous ces trésors! Une fois le choix crucial déterminé, on recevait notre cornet, difficile à tenir et souvent bien plus gros que notre petite tête. Ensuite, l’enjeu de garder la chemise propre devenait accessoire…

Album souvenir

Bien plus qu’une recette italienne, le gelato est un art de vivre… que dis-je, une histoire d’amour. Chez le marchand de glaces, il n’y a que des sourires. Avant de commencer notre balade à la découverte de quelques crèmeries à l’italienne, on vous offre notre album souvenir.

Hypnotisant: une crème glacée au dulce de leche qui tourne dans la turbine et sur laquelle on verse du chocolat fondu à la dernière minute pour créer des pépites.

Attendrissant: deux grands-pères italiens en goguette par un après-midi de canicule dégustant leurs cornets avec gourmandise.

Affriolant: le goût parfait d’une lichette de crème glacée à la banane dégustée dans une petite cuillère en plastique tendue par le glacier… juste pour goûter!

L’institution

Rocco et Angela D’Angelo sont venus des Abruzzes italiens pour s’installer à Montréal. Glaciers de métier, ils avaient dans leurs bagages une bonne recette. Depuis 1982, leur petite crèmerie a déménagé d’un bord de la rue Bélanger à l’autre, s’est agrandie en restaurant, puis en épicerie fine, pour finalement se diviser en deux: à l’étage, le Restaurant Roberto et sur la rue, Gastronomia Roberto, épicerie, traiteur, pâtisserie, café et salon de glaces dont le décor vient juste d’être rénové.

Car oui, ici, la crème glacée fait salon. À la mode européenne, on la sert en coupes garnies de fruits, de noix, de crème fouettée, nappée de chocolat ou de coulis, en gâteaux glacés comme ces baccettos, de petits biscuits au chocolat recouverts de glace chocolat-noisette et enrobés de chocolat… Mais aussi dans son plus simple appareil, à déguster sur place ou à emporter. "La recette de base est toujours la même: du lait, du sucre, des oeufs travaillés de manière artisanale, en petite quantité de 60 litres à la fois et on ajoute des essences pour les parfums", précise Carlo Avvampato qui tient aujourd’hui l’affaire familiale avec sa belle-soeur et sa femme, fille de Rocco et Angela qu’il a évidemment rencontrée en fréquentant assidûment le comptoir du glacier.

"Bien sûr, on a ajouté quelques saveurs plus modernes comme le cacao 70% ou le dulce de leche, mais ici, on aime les classiques: vanille, noisette, amaretto, nougat, fior di latte, par exemple, et quelques sorbets comme le citron, notre grand classique, ou litchi, une nouveauté de cette année. Moi, le parfum que je préfère, c’est cerise avec des brisures de chocolat", avoue-t-il, les yeux brillants de gourmandise.

Derrière le comptoir, les turbines – qui datent de la préhistoire à en croire Carlo – brassent la crème sans relâche; une fois prête, on la ramasse à l’aide d’un grand bâton en plastique autour duquel elle s’enroule comme un suçon géant avant d’être répartie dans les bacs du comptoir. "En été, on fabrique de 500 à 600 litres par semaine, selon la température… Eh oui, la saison est courte, pas comme en Italie… mais c’est ce qui me plaît le plus: il faut se dépêcher d’en profiter de ces petits bonheurs!"

Glacier d’exception

"La crème glacée est un produit de luxe. Avant la démocratisation de la réfrigération, il fallait des caveaux très profonds pour la fabriquer. Seuls quelques privilégiés pouvaient goûter à ce plaisir. Même si aujourd’hui, c’est un produit plus accessible, nous continuons à la travailler dans la tradition artisanale… Elle est éphémère, elle fond, elle est fragile: il faut en prendre soin." En quelques phrases, Matteo Sterzi nous livre sa profession de foi de glacier passionné. Dans ses boutiques Léo le glacier des avenues Duluth et Bernard, chaque détail compte. "Le lait est pasteurisé ici même. Il vient d’une seule ferme à Lavaltrie, cela nous permet de contrôler notre produit à 100%. Notre sucre de canne est bio, tout comme nos noix, importées d’Italie pour leur qualité. Nous utilisons du chocolat lyonnais Weiss, au rapport qualité-prix très supérieur. Autant que possible, nous travaillons avec des fruits frais d’ici. Nos contenants et ustensiles sont même recyclables…", énumère-t-il. Avec son ami et collaborateur Zind, le glacier a créé entre 250 et 300 recettes ces six dernières années. Des étonnantes, élaborées spécialement pour les restaurants comme celles à la moutarde de Meaux, au vin rouge ou au gorgonzola. Des saveurs dans l’air du temps à base de fleurs ou de légumes comme celles au poivron ou au concombre, d’autres avec des herbes fraîches comme l’ananas-basilic ou la framboise-thym (la préférée de Matteo). Et puis de grands classiques: pistaches, noisettes, café, coco ou zabajone dans la plus pure tradition italienne. "Nos gelati sont fabriqués avec moins de 6% de matières grasses, soit moins que la plupart des yogourts. Mais ça prend du sucre par contre… sinon ça donne de la glace pour patiner!" s’amuse Matteo. Ses commerces, ouverts d’avril à septembre, il les voit surtout comme des repaires de copains partageant une commune passion pour le gelato et le soccer. "Léo, c’était le nom de mon grand-père, qui adorait la crème glacée. J’ai appelé mon entreprise ainsi car je voulais des rapports humains authentiques, voir grandir les enfants de mes clients… on n’est pas ici pour faire tourner un business à tout prix!" D’ailleurs, ne soyez pas surpris: "Quand il fait gris, Léo reste au lit!" indique l’enseigne.

Le goût de la Petite Italie

À Pile ou glace, ce café-glacier artisanal de la Petite Italie, le maître de la crème glacée est… français, heureusement marié à une Italienne! "Mon beau-père nous a légué ses recettes qui ont fait leurs preuves pendant 30 ans dans son commerce de Calabre. Et cela fait dix ans qu’on perpétue la tradition à Montréal", indique Cédric Manen, propriétaire des lieux. "Les Italiens du coin aiment bien se moquer gentiment de moi, mais cela ne les empêche pas de venir se régaler!" ajoute-t-il en riant. D’ailleurs, même au coeur de l’après-midi en semaine, ils sont nombreux à s’arrêter pour emporter un cornet ou pour s’installer à table dans la fraîcheur climatisée du petit café ou sur la terrasse, le temps d’une pause glacée.

"On fait de notre mieux, tout est préparé sur place en petites quantités avec les meilleurs produits italiens possible comme des pistaches de Sicile, par exemple. Avec nos 35 saveurs, on n’est pas très funky: ici les gens aiment les classiques comme la vanille, la noisette, le chocolat. Mais je préfère rester traditionnel et offrir une très grande qualité", ajoute-t-il. La maison propose aussi des granités à la sicilienne aux agrumes, crémeux comme des sorbets, et quelques autres parfums plus originaux comme chocolat blanc, caramel, praline ou bacio (chocolat-noisette). "La glace, c’est un produit noble, le lait évolue, les textures changent avec le temps… j’aime travailler cette matière première et ça ne me dérange pas de me sacrifier pour goûter aux résultats!" commente Cédric en remplissant à ras bord un petit pot de ses créations à la texture riche, crémeuse et au goût intense… On se sacrifierait bien, nous aussi!

Carnet d’adresses /

Gastronomia Roberto: 2227, rue Bélanger, Montréal, 514 374-5653, www.gastronomiaroberto.com

Léo le glacier: 916, avenue Duluth Est
, Montréal, 514 658-9660; 1179, avenue Bernard Ouest, Montréal, 514 658-9646, www.leoleglacier.com

Pile ou glace: 7084, boulevard Saint-Laurent, Montréal, 514 273-3999