Accosté à la terrasse d’Au port de la goulette, je regarde couler le paisible courant de la 3e Avenue en sirotant un Long Island Iced Tea.
Des cyclistes solitaires, nonchalants. Des poussettes pleines de bébés. Des enfants qui tiennent la main de leurs parents. J’aime Limoilou. Ce quartier est une baie tranquille. On se laisse porter par la vie, dans ces rues pleines de balcons et de bras verts.
C’est ma première escale dans ce restaurant tunisien. Des chaises modernes en cuir noir contrastent avec les peintures, les pots en terre cuite et les broderies du Moyen-Orient. Les parfums qui émanent du menu me font déjà oublier tout le reste, y compris de goûter à la Citronata de Pierre, qui lui rappelle la tarte au citron de sa grand-mère.
Aux termes plus connus (gyros, shish taouk, harissa, tajine, pita, couscous royal) se mélangent de nouveaux mots: ojja (sauce tomate à l’ail amère où mijotent merguez ou crevettes), chapatas (pain carré artisanal), pastilla (sorte de baklava aux amandes farci au poulet) et bouza (crème pâtissière parfumée à l’eau de fleur de géranium). De la citronnade tunisienne maison, des jus (de fraise, de goyave, de mangue, de pamplemousse) et des thés (amandes, menthe) galvanisent mon envie d’écluser la Méditerranée tout entière.
Après avoir harassé notre aimable serveuse de questions, nous optons pour une trilogie d’entrées. Pierre se jette sur la fraîcheur du harissa offert dans une calotte d’oignon rouge, et accompagné de thon, de feta et d’olives. J’ai des envies de voyage. Je harponne un pain chaud dans la corbeille en osier que je trempe dans la sauce tomatée de mon ojja aux crevettes. Le plat est réconfortant, les crevettes croquantes, mais l’amertume enveloppante des épices oblitère l’ail. C’est la pâte feuilletée du brik qui me conquiert véritablement: le jaune d’oeuf coulant, le thon filandreux, le "kick" salé des câpres et des olives, le croustillant de la pâte. Parfait. Besoin d’aucun diplôme pour reconnaître à quel point c’est "bon dans gueule".
Suivent les plats de résistance que nous accompagnons de vin tunisien, sec et épicé, qui jouit d’une température très bien contrôlée. La carte des vins, pourtant très sobre, offre tous les vins au verre et possède une petite description des arômes de chacun. Très bonne idée.
La pastilla de Pierre est pour moi une révélation: la pâte filo, façon baklava, est d’un contraste fabuleux avec le mélange moelleux-croquant du poulet aux amandes. Ma tajine berbère aux boulettes de kefta, elle, est savoureuse, gorgée du suc des viandes et du jus des légumes présents. Un heureux mélange d’abricots, de fraises et de pruneaux séchés marié aux carottes, aux navets et aux zucchinis. Attention par contre, le tajine est brûlant et son contenu trop chaud. Même après un long moment d’attente, je dois souffler plusieurs fois avant d’oser porter ma fourchette à ma bouche. Une cuisson moins intense permettrait d’apprécier le plat à sa juste valeur.
Au dessert, le baklava met fin à notre gloutonnerie de façon définitive. Bien fait, avec cette note de pistache tant appréciée, j’y ajouterais un peu plus de miel ou de fleur d’oranger.
Mais la saveur est là et l’exotisme domine. C’est comme un port d’attache, un vent frais de Tunisie.
Emballant /
La vivacité des couleurs qui se répercutent en bouche, qui nous font découvrir la richesse d’une culture culinaire méconnue à Québec.
Décevant /
Le tajine, trop chaud, même après plusieurs minutes.
Combien? /
Pour deux, environ 55$ le soir pour trois services et 25$ le midi (excluant boissons, taxes et service).
Quand? /
Du mardi au vendredi de 11h à 22h. Samedi et dimanche de 17h à 22h.
Où? /
Au port de la goulette
1201, 3e Avenue
418 524-7070
www.portdelagoulette.com