Restos / Bars

Bistrot Le Moulin à poivre : Au nom des souvenirs

Depuis maintenant 13 ans, on revient au Bistrot Le Moulin à poivre comme l’on revient à la table de grand-maman, pour mordre dans la chair d’une cuisine française paysanne assaisonnée d’authenticité et relevée de gentillesse.

C’est un local comme il y en a trop peu. Un local brouillon où s’accrochent une enseigne de Kronenbourg 1664 par ici et des photos d’Elvis Presley par là.

Et c’est exactement ce qui fait le charme du Bistrot Le Moulin à poivre. Aucune notion de design et surtout aucune volonté de l’être. Cela me rappelle certaines institutions de Montréal, de New York ou de San Francisco. À cette époque pas si lointaine où la nourriture servie parlait pour elle-même et que son lieu de partage, le restaurant, ressemblait davantage à un album de créacollage (scrapbooking) qu’à un musée-discothèque.

C’est en recevant le menu que je réalise que le temps n’est pas immuable. Le bistro a légèrement changé sa vocation, il y a trois mois, et offre désormais burgers, pâtes, salades et poutines en plus de ses spécialités du terroir français: ris de veau caramélisés au porto, boudin noir aux pommes, cassoulet…

Nous voyons passer des assiettes de burgers autour de nous et les messieurs bien dodus paraissent si bien qu’ils me convainquent presque d’annuler mon rendez-vous avec la France.

Ce serait mal me connaître.

« Il vous reste des andouillettes grillées, monsieur? »

Mon hôte me répond à la négative, en me rassurant qu’il en recevra prochainement. Mon choix s’arrête donc sur la terrine de campagne et le cassoulet du Sud-Ouest. Émilie, pour sa part, y va tout de go pour le magret de canard et la soupe du chef.

La carte des vins est sans ostentation, comme le restaurant. De bons choix classiques et reconnus de tous, en passant de la région du Cahors au madiran. Nous optons pour ce dernier, un Alain Brumont 2007. L’accord sera idéal avec nos viandes relevées, le madiran étant trop caractériel pour la délicatesse du veau, par exemple.

Notre discussion animée s’éteint dès l’arrivée des entrées. La soupe de mademoiselle est agréable, riche en beurre, en crème et en légumes, avec une note acidulée qui occulte toute forme de lourdeur. Ma terrine est quelque peu fade et manque d’éclat, et ses condiments et ses croûtons manquent malheureusement de fraîcheur.

Lorsqu’arrive le cassoulet, je prends conscience que je travaillerai au nom de la satiété, ce soir. C’est un pur délice, du réconfort comme il s’en fait peu à Québec et que seul un cuisinier français peut concocter avec ce degré d’authenticité. Tout y est subtil, de la saucisse douce aux haricots et aux carottes qui fondent en bouche. La viande s’effiloche d’un rien et l’assaisonnement commande le respect. Rien à redire du magret de canard saignant d’Émilie, cuit avec un souci de tendreté difficile à retrouver dans un autre restaurant de la région. Et que dire de cette sauce sans doute liée à la glace de viande, au beurre et au bonheur? Impeccable.

Impossible de se rendre au dessert. Pourtant, quelques minutes après le vin, un fondant au chocolat trône entre nous et disparaît en quelques coups de cuillères.

Ce genre d’endroit sans menu coloré, sans page Facebook, sans service maniéré, comme extirpé du temps passé, peut sembler dur à quitter. Malgré tout, je ne suis pas déçu de partir.

Car je sais que je vais revenir.

Emballant /
Le cassoulet, le cassoulet, le cassoulet!

Décevant /
C’est parfois dans les détails que la cuisine prend tout son sens, c’est pourquoi j’aurais préféré que tous les plats soient accompagnés de persil haché frais et non séché.

Combien? /
Pour deux, environ 60$ le soir (pour une entrée, un plat principal et un dessert) et 30$ le midi (excluant boissons, taxes et service).

Quand? /
Du lundi au vendredi de 11h30 à 14h. Du mardi au samedi de 17h30 à 21h. Fermé le dimanche.

Où? /
Bistrot Le Moulin à poivre / Tabü Burgers
2510, chemin Sainte-Foy
Québec
418 656-9097