Restos / Bars

Versa : Plein la vue

La bistronomie du Versa, visuellement époustouflante, semble davantage transportée par un désir de créativité et de technique qu’un souci d’harmonie dans les saveurs.

La musique est forte. Elle m’entraîne au fond du couloir nimbé d’une teinte rose violacée. Il est déjà 21h et l’atmosphère bouillonne de monde. Je suis épris d’esthétisme. Les gens sont beaux, la soirée est jeune. Je me vois fêter ici, avec mes amies, jusqu’à plus soif.

Parce que la carte des vins s’est vu attribuer quelque sentiment de célébrité (l’établissement remporte depuis trois années consécutives le prix d’excellence Wine Spectator), j’y plonge mains premières: bulles, rosés, portos, vins doux; le Versa me fait voyager de la chaude Toscane à la fraîcheur de l’Alsace en passant par l’Autriche et les arômes herbacés des vins de la Nouvelle-Zélande. Une carte solide, qui propose des vins très connus et d’autres, plus recherchés, pour le sommelier et le curieux.

Mes compagnes et moi débutons avec un chenin blanc qui sera suivi d’un chardonnay unoaked (Townsend Jack) produit ici au Canada, plus gras et plus rustre, compagnon idéal de la chaleur du comfort food bistro commandé au plat principal.

Ce côté bistro, très présent au menu, allie des plats réconfortants de la cuisine française et ne se cache pas de les élever: la langue de veau façon pastrami, les rillettes de cochon braisées et leur cerceau de croûton et le boudin noir et son flanc de porc côtoient les filets de boeuf, tartares et saumons classiques.

Je suis d’abord fasciné. Un coup de pinceau de crème d’avocat piqueté de cinq choux de purée à l’orange est traversé d’un cylindre de crabe des neiges effiloché. C’est beau, très beau, mais ça se gâte sur le palais. L’amertume acide de la purée d’orange est intense: elle s’arroge toutes les saveurs du plat. Et le crabe, livré seul à ma fourchette, se révèle fade: sans doute parce que la saison de pêche s’est terminée en novembre et que le produit n’est pas aussi frais que souhaité.

Rosalie aurait voulu des calmars frits un peu plus tendres. Pour ma part, je me questionne sur l’accompagnement d’aïoli aux câpres. Selon moi, nos petits amis si populaires s’accordent davantage aux herbes et à la tomate qu’à l’ail.

Arrive ensuite l’ostentatoire assiette de Gabrielle: des pétoncles géants et des crevettes longeant les rebords de l’assiette, étendus sur une berge rocailleuse de gnocchis à la ricotta, où le centre de l’assiette fait office de lac à la crème de pois sucrés et de menthe. Wow. La cuisson des pétoncles, à l’unilatéral, est parfaite. La crème de pois à la menthe est bien dosée, mais l’ensemble ne semble pas s’entendre une fois en bouche. Et la macédoine de pois et de carottes n’apporte rien au plat, que ce soit en fait de texture ou de goût.

J’aime l’idée de mon boudin blanc farci aux ris de veau. Idéal quand on pense au froid qui s’attarde dehors. La crème, les lardons et les oignons sont des choix gagnants. Seule suggestion: enlever la peau des saucisses de boudin et en faire des cubes, c’est plus fin et agréable à déguster.

Rien à redire sur les desserts, le Versa fait ici sa marque: pot à la crème au chocolat et au café, croûte aux amandes. Un délice où l’amande apaise le sucre et harmonise la finale.

En m’apprêtant à partir, je remarque que le restaurant n’est pas près de fermer: on enlève les tables et on se prépare à festoyer. Je rencontre un groupe d’amis près des fenêtres.

Restons, j’ai encore soif.

Emballant /
La présentation des assiettes.

Décevant /
Le manque d’équilibre dans les saveurs, comme si la forme précédait la fonction. Au-delà de la beauté, certains accompagnements sont superflus.

Combien? /
Pour deux, environ 90$ le soir (pour une entrée, un plat principal et un dessert) et 35$ le midi (excluant boissons, taxes et service).

Quand? /
Du lundi au vendredi, de 11h30 à minuit. Les samedis et dimanches de 17h à minuit.

Où? /
Versa
432, rue du Parvis
Québec
418 523-9995
www.versarestaurant.com