Restos / Bars

Pain béni : Les nourritures célestes

Il n’y a pas de nectar ni d’ambroisie au menu du Pain béni, ce qui ne change rien au fait qu’on y mange comme des dieux. Merci au chef Simon Côté-Tremblay, qui apprête brillamment sa cuisine du marché en ouvrant la porte à l’inventivité.

Pourquoi n’avais-je jamais mangé dans ce resto qui roule sa bosse depuis presque huit ans? Parce que je fuis la section piétonne de la rue Sainte-Anne, pour cause de surdose de touristes. Honte à moi. Que de festins j’ai ratés! Désormais, le Pain béni, dans l’Auberge Place d’Armes, figurera sur la liste de mes favoris. Pour la bouffe, bien sûr, mais aussi pour le service, aimable et avisé.

Jeudi soir post-Fêtes – période creuse s’il en est -, la salle à manger aux murs de pierre et de brique, pimentée par le rouge des chaises tout en courbes, est aux trois quarts pleine. Un apéro? Volontiers. Nous sommes quatre assoiffés… et affamés. Nous commanderons donc nos plats en même temps. Une fois quelques mystères élucidés par notre serveur (détails sur les huîtres, le boudin), ne nous reste plus qu’à saliver.

David boira sa Corne du diable (microbrasserie Dieu du ciel!) avec un des meilleurs boudins que nous ayons mangés. Grillé, fondant et superbement épicé, il trône sur une sublime tarte tatin au calvados. Ma-la-de, diraient les jeunes. On m’a suggéré un Chambord-tini pour accompagner ma verrine de mousse de chèvre et gelée de framboise, servie avec plusieurs tranches de prosciutto, des betteraves marinées et un grissini maison. Très bon, mais le chèvre utilisé est délicat; la charcuterie en anéantit le goût. Mieux vaut les manger séparément. Quand même, je ne regrette pas mon choix – le foie gras poêlé et son pickle de figue avaient failli ravir mon coeur.

Jacques se régale lui aussi du boudin, alors que Bénédicte fait honneur à son consommé de homard, citronnelle et gingembre, qu’elle aurait cependant aimé plus relevé, tout comme les raviolis de chou, carotte et homard qui y baignent.

Nous nous excitons en repérant une petite syrah (Parducci) dans la carte des vins. "Nous n’en avons plus", nous annonce le serveur. Malheur. Nous nous rabattons sur un assemblage de trois pinots noirs de Joseph Swan (Cuvée de trois), excellent et étonnamment charpenté.

À part Bénédicte, un peu déçue de son plat de saumon sauvage poché au pamplemousse rose et amandes (la purée de chou rouge, amère, s’accorde mal avec l’agrume), nous allons de bonheur en ravissement. David, avec du chevreau de la Ferme à l’Oie, dont la saveur imposante s’harmonise étonnamment bien avec celle de la pieuvre grillée au citron confit servie en accompagnement, en plus d’un falafel et d’une mousse de yogourt et tahini – de loin le plat le plus original et réussi. Jacques, avec ses pappardelle aux généreux morceaux de homard, jus de volaille au foie gras (divin!), trévise, roquette et copeaux de parmesan. Et moi, avec mon moelleux lapin du Québec, bardé de prosciutto et farci à l’épaule confite et cèpes, le tout en croûte de champignons séchés (un peu trop friable), escorté d’une purée de pois verts tout en velours et d’un délicieux risotto à la mozzarella di buffala.

Ce ne sera pas au dessert que nous quitterons le septième ciel. La faute en revient à ce crémeux au chocolat servi avec un beurre d’arachide maison (un brin sucré, très onctueux), une banane flambée au cognac, une glace vanille et un cake chocolat-arachides. Puis, à ce pavlova (une meringue au centre coulant) au pamplemousse rose, accompagné de crème mousseline, yogourt glacé à l’amaretto et nougatine aux amandes. Même les dieux n’ont probablement jamais savouré pareilles délices… Aucun doute: ce repas restera longtemps gravé dans nos mémoires.

Emballant /
Une cuisine inventive basée sur d’excellents produits, très abordable pour la qualité… et le secteur. Un personnel courtois, sympathique, informé.

Décevant /
Quelques discordances dans l’harmonie des saveurs.

Combien? /
Pour deux personnes, pour trois services, 95$ le soir et 35$ le midi (excluant boissons, taxes et pourboire).

Quand? /
Tous les soirs ainsi que le midi du lundi au vendredi.

Où? /
Pain béni
24, rue Sainte-Anne
Québec
418 694-9485
www.aubergeplacedarmes.com