Restos / Bars

Laurie Raphaël

Harmonieuse et rigoureuse, la cuisine de Daniel Vézina témoigne de cet équilibre entre la recherche et le plaisir qui fait les plus grandes tables.

À côté de nous, un couple semble fêter un anniversaire. On n’ose pas leur demander lequel, mais on devine leur ravissement tandis que défilent devant eux les huit services (et vins idoines) du menu gastronomique. Moins gourmande, Sophie plaide en faveur de la carte, et moi de la surprise totale. Le menu Chef Chef, pour un prix raisonnable, vous invite à manger à l’aveugle, ne sachant qu’au moment du service ce qui vous est servi, de l’entrée au dessert.

Le service, justement, est d’une extrême politesse, mais jamais empesé, l’engrenage de la machine du Laurie ne semble souffrir d’aucun délai. Les mises en bouche arrivent, et maquereau grillé avec crumble de prosciutto et crème sure fumée viennent subtilement éveiller nos appétits en latence.

Pour l’entrée, Sophie hésitait entre le foie gras poêlé, le maquereau grillé (comme la mise en bouche) et le flétan avec ses couteaux de mer. À choisir, j’aurais pris le gravlax de filet de bœuf. Mais c’est le flétan qui a trouvé le chemin jusqu’à son cœur. Baignés d’un jus de pêche au raifort et gingembre, on imagine que les poissons exploseront de saveur. Mais on navigue sur un océan d’une extrême douceur, et peut-être même qu’on aurait préféré un peu de houle au lieu de cette extrême discrétion dans l’assaisonnement. Mais cela a le bénéfice de laisser toute la place au poisson et aux couteaux, délicieux. Ma première surprise est un tataki de bœuf, entouré de petits monticules d’un pudding de demi-glace et d’un pudding de betteraves (avec vinaigre de framboise), et couvert d’une vinaigrette aux champignons matsutakes et boutons de marguerite. Un mot: perfection. Tout s’agence parfaitement, les champignons et la viande étant instantanément élus couple de la soirée.

La suite est à l’avenant. Le veau piémontais de Sophie est cuit à la perfection, rose au cœur et croustillant en surface, la portion est généreuse, la purée d’oignons caramélisés est lisse comme un rêve érotique, son goût riche ajoutant au bonheur de son onctuosité. Sur le dessus, un popcorn d’amarante propose un contrepied de goût et de texture tout à fait réussi. Les chanterelles poêlées à la moelle sont exquises, et voilà que nous ne parlons plus guère, occupés que nous sommes à dévorer nos plats. D’autant que le mien est du même calibre. Un râble de lapin farci aux shiitakes et épinards, accompagné d’un sublime caviar d’aubergines, de pâtissons, crosnes, pleurotes et d’un jus de viande, me condamne joyeusement au silence.

Le délicieux cake au citron Meyer et mon ultime surprise (sphérification de canneberges, purée aux betteraves, crumble au romarin, mousse de chèvre et des canneberges confites) confirment que nous sommes ici chez de grands artistes du goût.

Emballant /

Le service professionnel et détendu, les conseils œnologiques détaillés, l’ambiance chaleureuse.

Décevant /

Quelques assiettes pas assez chaudes, tout juste tièdes.

Combien /

Environ 175$ le soir et 46$ le midi. Pour deux personnes, trois services, excluant taxes, boissons et service. Le menu Chef Chef est à 60$ par personne, plus taxes.

Quand /

Le midi du mardi au vendredi. Le soir du mardi au samedi, de 17h30 à 22h.

Où /

117, rue Dalhousie, Québec
418 692-4555
laurieraphael.com