Au 1616, la technologie s’invite à table
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C’est au bar que commence la soirée, dans le sous-sol de ce resto ouvert mi-septembre. On veut voir l’attraction du 1616 : R1-B1, le robot barman. Il est là, au fond de la salle, derrière un comptoir aussi blanc que lui. R1-B1 a un petit air de C-3PO, une voix métallisée et pas mal d’humour. Sans se retourner, il attrape la bouteille rangée derrière lui tout en draguant un peu une cliente (un vrai barman), verse un verre de bulles et le dépose sur le tapis roulant qui me l’apporte.
Le robot danse si on lui demande, blague avec les clients – y compris en anglais – et sert des verres à la clientèle. Impressionnant. C’est sûr, voilà de quoi pimper sérieusement un 5 à 7 ou un digestif de fin de soirée. R1-B1, qui a demandé un an et demi de travail pour le mettre au point, est le seul robot-barman interactif piloté au monde.
« Si j’aimais les voitures de sport, j’aurais pu m’en payer plusieurs à la place », plaisante Cédric Moindrot, le directeur artistique et consultant du restaurant, au sujet du prix du robot. Une machine qui demande de l’entretien et de la supervision – et qui ne donc vole pas d’emplois, ajoute-t-il.
Le mobilier immaculé du bar baigne dans une lumière bleutée, une ambiance un peu futuriste-kitsch qui ne plaira pas à tout le monde mais qui est en tout cas raccord avec son hôte non-humain. Mais passons à l’étage, on est venu ici avant tout pour manger… Car si le 1616 va sans doute attirer de nombreux clients avec son robot, il faut ensuite avoir une belle offre culinaire pour les garder.
À l’étage restaurant, la déco (imaginée par FMDA Architectes et LHV design) reste dans le blanc et le moderne. Mais les fauteuils Voltaire viennent amener un peu de rondeur à la salle de 75 couverts, égayée également par les grands tableaux d’art contemporain – c’est que le chef est amateur d’art et peintre à ses heures. Dès l’été prochain, une terrasse sera aménagée dans la cour intérieure, ajoutant 60 places.
Côté menu, le chef français Joris Larigaldie (passé notamment par le Manoir Hovey et le Ripplecove) propose une cuisine française à base de produits du Québec. Les plats jouent avec de la fumée, des couleurs vives et des ingrédients présentés sous plusieurs formes – le dessert de citrouille, avec meringue au thym, camomille et miel, est un délice.
La cuisine est sophistiquée et la qualité des produits est bien là. La présentation des assiettes, très travaillée, rappelle le penchant artistique du chef. On pense ainsi à ce dessert en hommage aux automatistes de Montréal, sur lequel le client est invité à dessiner à l’aide de peinture alimentaire. Autant de couleurs et de créativité qui amènent un peu de chaleur dans l’espace immaculé de la salle. Côté cocktails, c’est Alexis Taoufiq (mixologue Meilleur Ouvrier de France) qui signe la carte.
Cédric Moindrot, toujours dans sa volonté d’intégrer technologie et nouvelles tendances numériques dans l’expérience client, ne s’est pas arrêté au robot-barman. Sont également prévus au programme des « show live cooking » (bouillon déshydraté dans des capsules Nespresso, plaque de cuisson inversée…) et des boîtiers installés aux tables sur lesquels les clients pourront appeler le serveur, aviser le voiturier de leur départ ou laisser un commentaire.
Dans les prochains mois, le restaurant devrait également ouvrir une salle dans laquelle les clients vivront «une expérience immersive gastronomique où les cinq sens seront mis de l’avant». «La gastronomie est un art en perpétuelle évolution et c’est d’autant plus vrai avec l’apparition de nouvelles technologies, explique Cédric, Français venu s’installer l’année dernière au Québec. Montréal est aujourd’hui l’une des principales capitales mondiales en matière d’innovation et de gastronomie.»
Beaucoup de nouveautés technologiques qu’on pourra tester dans les prochains mois donc. En attendant, la cuisine tient sa place et fait en sorte de ne pas rester dans l’ombre des concepts numériques. Installé dans un coin de la ville qui manquait un peu de bonnes adresses, le resto participera en outre à Montréal à table. Une belle occasion d’aller tester la cuisine artistique de Joris Larigaldie – et, bien sûr, de rencontrer R1-B1.
1616
1616, rue Sherbrooke Ouest – Montréal
www.le1616.ca