Lary Kidd, le rappeur qui carbure au nature
Si on imagine les rappeurs une Labatt à la main, Lary Kidd est pour sa part un grand amateur de vins nature. On a discuté avec l’auteur de Surhomme des bonnes quilles qu’il s’enfile dans les loges, de ses dégustations de petits producteurs et de ses caisses d’importations privées.
Le vin nature, t’es tombé dedans à quel âge?
Ça fait deux, trois ans. C’est arrivé à force d’en boire ici et là dans les bars avec mes amis… La piqûre s’est faite au Majestique y’a quelques années. C’est né comme ça, tranquillement pas vite, avec l’avènement des macérations et des vins funky. Aujourd’hui mes propres copains en importent et je peux faire mes petites sélections privées.
Je fais ça avec Wino Import, où travaille mon ami Guillaume. Ce qui est cool avec le fait d’avoir un copain dans le domaine, c’est qu’il me fait des sélections. Il sait ce que j’aime : il me met des vins de soif et deux trois vins complexes pour les soupers, des gros trucs à carafer. J’ai pas trop à y réfléchir.
Tu bois quoi quand c’est toi qui choisis?
Je suis un gros buveur de Morgon. Sinon, j’aime bien n’importe quelle jeune macération pelliculaire, quand y’a un petit truc rêche à la fin de la gorgée… Ça, j’en bois beaucoup. Mais chez moi la connaissance n’égale pas l’intérêt. Je connais ça de base, je sais ce que je bois, mais j’ai pas de connaissances approfondies.
C’est quoi ton budget mensuel en vin?
Je sais pas exactement… Mais c’est sûr que c’est pas un petit budget!
Tu bois que du nature ou tu vas parfois vers des bouteilles conventionnelles et plus classiques?
C’est sûr que maintenant c’est difficile de retourner à la SAQ et de prendre un Pisse-Dru! J’essaie de ne boire que du nature. C’est ce que j’ai à la maison, au chalet, dans les loges en spectacle… En plus du cognac. Y’a beaucoup de cognac avec Loud! Il est commandité par Hennessy Canada alors c’est ce qu’on boit. Lors des spectacles, je bois modérément avant, je bois un peu pendant, mais je bois surtout après.
On associe beaucoup les rappeurs avec la bière un peu cheap…
Oui, mais ça a un peu évolué. Par exemple, je croise des rappeurs ici et là qui s’envoient des grosses quilles de nature – je vois tout le temps Action Bronson à la Chambre Noire à Paris en train de boire du Brutal… Y’a peut-être un préjugé, mais plus par rapport au cognac. Et pour ça, we live up to the legend : on boit effectivement du cognac à chaque spectacle!
Et les vins québécois, t’en penses quoi?
J’ai goûté à pas mal tout Pinard et Filles, et je trouve ça très bon. Guillaume de Wino travaille aussi sur une cuvée de maréchal Foch et de frontenac noir, une espèce d’assemblage qui est vraiment bien. J’ai goûté ça pendant une dégustation privée au vinvinvin, et c’était très bon. Sinon, j’ai pas vraiment de connaissances sur les autres…
Le vin nature, ça aide pour écrire?
Pourquoi pas… Quand on picole, on s’échange des idées en déconnant avec les copains. Mais ça m’enivre plus que ça me fait réfléchir. Sinon, c’est rare que je me donne des moments de composition, que je m’assoie pour écrire… Les paroles viennent quand je suis occupé et que je fais autre chose, et je les emmagasine dans ma tête.
Tu sors ton nouvel album, Surhomme, le 1er novembre. Paraît qu’il va y avoir du vin nature lors de ton lancement au Foufounes Électriques…
Il va y avoir de la bière aussi. On veut pas dénaturer l’endroit! On veut juste que les gens qui veulent s’envoyer du bon vin puissent avoir l’occasion de le faire. Il va y avoir un rouge, le Brain de folie du Domaine du Mortier, du gros glouglou, une macération, le Vej Bianco Antico de Podere Pradarolo, quand même wild, et un blanc, le muscadet Les Parcelles du Domaine Les Hautes Noëlles, un blanc sharp et léger.
Tu nous parles un peu de l’album?
C’est un excellent album de rap qu’on a pris le temps de faire. C’est 12 bonnes chansons bien façonnées, et je suis également fier des 12. Le titre Surhomme, ça vient de Ainsi parlait Zarathoustra de Nietzsche. Mais ça, c’est juste pour bien paraître intellectuellement… C’est plus l’idée du rappeur qui se place au-dessus de tout, qui est cynique, lassé. C’est le rappeur qui se croit surhomme.
Le précédent album, c’était plus un trip artistique super sombre et pas très digeste. Là c’est un peu plus accessible, plus joyeux aussi, plus concis. Mais bon, ça s’inscrit pas non plus dans la nouvelle vague de rap chantonné léger.
Tu nous proposerais quel accord vin-musique, en écoutant ton album?
J’irais avec le Gamay sans tralala du Domaine de la Garrelière, en Touraine. Ou Les Grelots de Sylvain Bock. Quelque chose qui se boit comme du jus, à la bouteille…