Savourer la nostalgie au Roseline
C’est le petit-nouveau du Plateau : un bar à vin au nom désuet, qui nous plonge directement dans les années 30…
Il neige à gros flocons dehors et l’intérieur du Roseline garde cette impression de calme enveloppant – la chaleur en plus. C’est Édith Piaf qui nous accueille en musique, suivie d’un jazz feutré. L’intérieur est à l’image de la bande-son : vieux fauteuils en cuir d’antan, éclairage tamisé, portraits d’époque en noir et blanc sur les murs, vaisselier sur lequel reposent des assiettes fleuries, sol carrelé à l’ancienne… Tout a été travaillé dans les moindres détails et l’effet est réussi.
C’est que Jean-Marc Renaud, le maître des lieux, a tout une carrière de directeur artistique en pub et cinéma derrière lui : créer des lieux et des ambiances, c’est dans ses cordes. Le Roseline n’a donc pas fait appel à une firme de design intérieur pour sa déco, et ça se sent. L’endroit a sa personnalité ; on est loin des styles scandinave épuré ou bohème végétal qu’on voit quasiment partout ailleurs. Les années 30 se retrouvent de la musique – avec les mélodies d’époque en fond musical – jusqu’aux toilettes, avec tapisserie brodée au mur et dorures vintage.
Si le lieu a des airs de vieille bibliothèque anglaise, de speakeasy ou encore de salon de cigares, il a a aussi un côté chaleureux et intime, comme si on était chez quelqu’un. C’est que Jean-Marc nous invite ici presque chez sa grand-mère – dont le portrait en médaillon trône d’ailleurs au-dessus du bar. Les fauteuils et canapés viennent de chez elle, et le nom de Roseline, un mélange entre les prénoms de la mère et de la sœur du propriétaire, renvoie aussi à la famille.
Côté carte, j’ai tendance à me méfier quand je vois un nouvel établissement s’attribuer le qualificatif de « bar à vin », souvent porté abusivement. D’autant que le sommelier du Roseline n’est autre que le comédien Martin Laroche (Ruptures, Fugueuse, etc.), qui signe ici sa première carte des vins. Les deux comparses se sont d’ailleurs rencontrés lors d’un casting.
Mais le résultat passe le test : une carte modeste mais bien faite, principalement axée sur la France avec quelques bouteilles du reste du monde, des vins plus classiques comme des crus plus tendance, en bio ou nature. On trouve aussi une intéressante sélection de spiritueux locaux – dont un petit nouveau, le Pastis de Montréal, distillé à Rosemont et qui clôt joliment un repas.
Côté bouffe, on se commande quelques assiettes à partager (pas vraiment une coutume des années 30, mais passons) : œufs mimosa, betteraves à la crème sûre, tartare, choux de Bruxelles avec câpres et parmesan… Les plats sont simples mais bien exécutés – mention spéciale à la bavette, cuite à la perfection. On termine en beauté avec la fameuse omelette norvégienne flambée à la chartreuse. C’est Alex Collyer, l’ancien chef du Bon Vivant, qui est aux fourneaux. Le résultat est est sans prétention mais gourmand à souhait.
Si Jean-Marc a exercé dans le milieu de la télé, il a aussi une formation en design et en hôtellerie. Il a notamment travaillé plusieurs années au resto de ses parents (La Renaudière, à Sainte-Rose). Pour son premier projet en solo, il a bien fait les choses. Et entre les chansons presque centenaires, le décor suranné et le temps qui ralentit autour du repas, on se laisse doucement aller dans la nostalgie… Rien de mieux qu’un peu de vin pour ralentir un moment la chute des flocons de neige.
Le Roseline
5014, boulevard Saint-Laurent – Montréal