Beaucoup de gens ont réagi aux propos que j'ai tenus ces derniers jours. Voici des extraits de deux courriels que j'ai trouvé particulièrement pertinents.
Christine Gauthier: «L'école est devenue la panacée universelle pour tous les problèmes sociaux. Nos jeunes sont obèses? Augmentons les heures allouées à l'éducation physique et retirons les distributrices de boissons gazeuses des écoles (mais de grâce, gardez la poutine au menu des cafétérias!). Nos jeunes prennent de la drogue? Abordons ce sujet dans les cours de Formation personnelle et sociale. Nos jeunes ont des relations sexuelles de plus en plus tôt? Donnons des cours de sexualité. Ce n'est plus le problème des parents, ils sont de toute façon trop occupés pour s'en préoccuper.»
Yves Bolduc: «Je travaille depuis lundi dans une école qu'on dit défavorisée, auprès des jeunes du secondaire qu'on dit puckés. Oh, bien entendu, ils ne sont pas encore là, les jeunes. Ils arrivent le 30 août.
Notre équipe d'intervention se prépare à porter la lourde mission de les aider à rendre leur passage scolaire significatif en leur permettant de régler un tas de problèmes qui n'ont rien à voir avec l'école mais qui les empêchent entre autres d'apprendre et de se développer sainement. De quoi je parle?
Je parle de ces jeunes qui sont les dignes descendants d'une lignée de 4 générations d'assistés sociaux. Marqués au fer rouge de la pauvreté tant économique que culturelle et affective. Je parle de ces jeunes qui sont garrochés à la garderie le plus tôt possible, puis dompés à l'école juste parce que les parents sont absents ou inadéquats. Je parle de jeunes qu'on méprise lorsqu'on les regarde déambuler dans la rue, qu'on interpelle sans raison quand on est flic et qu'on exploite et humilie quand on est leurs pairs.
Ces jeunes qui ont 70 % de chance de décrocher avant l'obtention de leur diplôme d'études secondaires, qu'on trimballe d'une famille d'accueil à l'autre, qui n'ont aucun modèle d'individu fonctionnel dans leur cadre de vie normal, ces jeunes que vous croyez indisciplinés et qui manquent attrocement de savoir-vivre, ces jeunes là, Richard, le 30 août, ils vont revenir s'asseoir sur un banc en n'ayant pas la moindre idée de l'utilité de la chose, le ventre vide, les horizons fermés, la vie complètement bouchée. Vous croyez que ça dispose à apprendre? Vous croyez que plus de discipline y changera quelque chose?
Pour être capable d'apprendre à écrire, il faut d'abord avoir appris à vivre. Hélas, ces jeunes-là, personne ne leur a appris…»