BloguesRichard Martineau

Le monsieur est pas content

Le 11 août, dans ma missive intitulée «Tsé, man, fuck, tsé», je m'en prenais aux oiseaux de malheur qui passent leur temps à affirmer que la culture québécoise est menacée. «Où ça? demandais-je. Il n'y a jamais eu autant d'immigrants qui parlent français, autant de nouveaux chanteurs, de nouveaux réalisateurs, de nouveaux comédiens… Écoutez-vous la musique québécoise, bordel? Charles Dubé, Pierre Lapointe, Les Trois accords, Taïma, Martin Léon, Corneille, Ginette, Andrée Watters, Dumas, Vincent Vallières, Yann Perreau, Ariane Moffatt, Amélie Veille, Stefie Shock… On dirait que chaque semaine, trois nouveaux auteurs-compositeurs-interprètes voient le jour. Et vous dites que la culture québécoise est en péril?»
Ces propos m'ont valu une réponse vitriolique d'un lecteur, Maxime Catellier:

«Cette rimbambelle d'artistes (Pierre Lapointe, Dumas…) servent une clientèle de vieux, boomers ou gloomers (génération X) dont vous faites partie, et une clientèle de jeunes cons dont les goûts ne se sont pas encore délivrés de la censure qu'opère Audiogram sur la musique actuelle. C'est ce que vous voulez entendre, de beaux textes français presque de France, chantés par de beaux jeunes hommes et de belles jeunes femmes qui ont de petites coupes de cheveux un peu croches, juste assez pour ne pas brimés votre goût du gris et du juste assez.
La musique dont vous faites mention n'est QUE facilité. Ces artistes sont un exemple frappant qu'il suffit d'avoir une belle gueule et de bons contacts pour réussir.
N'avez jamais entendu parler de WD-40, de Jérémi Mourand, des Breastfeeders, de tous ces groupes de rock and roll qui, loin d'avoir baissé les bras après la mort de Brian Jones, continuent de cracher dans les micros qu'on leur prête, faute de moyens plus percutants?
N'avez jamais entendu Jean Derome, René Lussier, Bernard Falaise, Joane Hétu, Lori Freedman, Martin Tétreault, et tous ces gens de la scène actuelle qui s'efforcent de faire progresser la musique, non pas dans l'unique but de créer des formes appréciables, mais aussi des formes nouvelles, qui explorent l'engeance des sons dans le périple inabordé de la connaissance des métronomes surprenants et des terres nouvelles du décibel?»

Entre vous et moi, dans le genre prétentieux, j'ai rarement vu pire. Ce garçon-là rédige probablement ses lettres devant un miroir, pour se regarder écrire… Il se prend pour un prix Nobel parce qu'il est capable d'écrire des mots de plus de trois syllabes. Il faut dire que par les temps qui courent, c'est effectivement rare. Ses amis doivent le considérer comme un grand intellectuel…
Plus que le ton, ce qui m'énerve, dans ce texte, c'est le message. À savoir que ce qui est underground est NÉCESSAIREMENT génial, et ce qui est «mainstream» est NÉCESSAIREMENT merdique. Cette proposition est ridicule.
Prenez le cinéma (la forme d'art que je connais le mieux). Il y a de grands films indépendants, certes, mais il y en a aussi de très, très mauvais. Idem pour les films produits par les grands studios. Le fait de tourner un long métrage avec deux broches, trois sous et quatre épingles n'est pas une garantie de qualité. Et le fait bénéficier d'un budget de plusieurs millions de dollars n'est pas une garantie de mauvaise qualité. C'est quoi, cette idée de con?
Et si vous pensez que Pierre Lapointe a réussi grâce à sa gueule et non grâce à son talent, vous vous mettez le doigt dans l'oeil, sieur Catellier.