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Jeu de la morale: élément de réflexion

Vous connaissez Michael Ignatieff? Il s'agit d'un intellectuel canadien de gauche, qui a appuyé l'intervention américaine en Irak – comme le britannique Christopher Hitchens et le français André Glucksman.
Selon Ignatieff, il faut TOUT faire, TOUT (y compris avoir recours à la torture), pour éviter un deuxième 11 septembre. Car si une autre attaque ébranlait l'Occident (plus particulièrement les États-Unis), l'État de droit en prendrait un sacré coup. Le 4 juillet dernier, Réal Pelletier, l'excellent chroniqueur de La Presse, traduisait des extraits d'un texte qu'Ignatieff avait écrit dans le New York Times.
Je vous offre une partie de ce texte, afin d'alimenter votre réflexion suscitée par notre premier Jeu de la morale.

«Une fois les zones de dévastation délimitées et les morts enterrés, nous pourrions nous retrouver dans un état d'alerte permanente, avec des frontières verrouillées, des contrôles d'identité à tous les coins de rue, des camps de détention permanents pour dissidents et étrangers. Nos droits constitutionnels pourraient disparaître de nos tribunaux pendant que la torture pourrait réapparaître dans nos cellules d'interrogatoire. Le pire, c'est que le gouvernement n'aurait pas à imposer sa tyrannie à une populace avachie; nous la réclamerions, cette tyrannie, pour notre propre protection. Et si les institutions de notre démocratie se révélaient incapables de nous protéger de nos ennemis, nous pourrions aller plus loin et prendre la loi entre nos mains. Nous avons une histoire de lynchage dans notre pays et pour peu que la peur et la paranoïa s'installent profondément en nous, nous pourrions répéter les pires épisodes de notre passé, assassinant nos anciens voisins qui furent jadis nos amis.»

«Pour battre les démons, il nous faudra peut-être composer avec les démons, ce qui veut dire: détention illimitée de suspects, interrogatoires musclés, assassinats sélectifs, voire guerre préventive. Initiatives démoniaques parce qu'elles dérogent au droit national et international et parce qu'elles conduisent à tuer des gens ou à les priver de liberté sans procédure régulière. Elles ne peuvent se justifier que dans la mesure où elles préviennent de plus grands maux. La question est de savoir si nous devons composer avec ces bassesses ou si nous devons laisser des mécréants prendre le contrôle d'institutions libres.»