«Bonjour monsieur Martineau! Je suis persuadé que vous êtes écoeuré d'entendre parler de Jeff Fillion et de tout le tapage médiatique qui entoure l'Affaire. Moi aussi! Mais je ne peux m'empêcher d'écrire, ne serait-ce que pour en finir à ma façon.
J'ai grandi dans la capitale nationale (dans le fief fidéen de madame Boucher, pour être plus précis!), et croyez-moi, je suis l'affaire de très près, et ce même si je vis à Montréal depuis presque six ans.
Moi, tous ces gens défendant à point levé le dit personnage me rassurent énormément. Ils me rassurent et confortent cette idée que j'ai toujours eu de Québec : Un endroit moyen où tout le monde est moyen, normal, propre, où il faut avoir sa maison, sa belle pelouse, ses beaux enfants, loin de tous les maux de la terre: c'est-à-dire les pauvres, les terribles squee-gees, les quêteux, les prostitué(e)s, les graffitis, et (mais ça ils le disent tout bas) les tapettes et les ethnies qui envahissent notre plusse beau pays.
Comme ils me rassurent dans ma décision de m'établir (que dis-je! M'exiler!) dans une métropole ouverte sur le monde, où la diversité règne!
Ces jeunes confrères prédisent que la vague "X" atteindra Montréal d'ici peu, et que nous verrons enfin la lumière! Comme c'est insultant! Comme si je n'étais pas capable de me faire une opinion par moi-même! Comme si, pour être vraiment rebelle, il fallait chier de la bouche, et ainsi pourfendre tout ce qui n'est pas conforme à notre petite vision restreinte du monde tel que nous l'entendons.
Je n'ai pas besoin de vénérer un gourou pour me sentir rebelle.
J'ai beau chercher, j'ai beau creuser, je ne trouve rien. Les débats d'idées sont inexistants dans les émissions qu'anime Jeff Fillion. Point à la ligne.
Dans le fond, les gens de Québec sont victimes de leur propre stérilité culturelle. Se trouvant finalement tous seuls avec eux-mêmes, dans une ville plate comme un épisode des "Super Mamies", un sauveur leur propose une toute autre aventure spécialement conçue pour eux… Un sport extrême est donc né: le chiage par la bouche.»
Jean-Pierre Bécotte, 27 ans, Montréal