Des réactions aux récents propos (et à la lettre ouverte publiée il y a deux ans dans VOIR) de Christian Bégin.
Alexandre Rowe
«Je crois que Christian Bégin n'a pas tout à fait tort mais qu'il n'a pas tout à fait raison non plus. Avant d'être un métier, la comédie est un art. Il est parfaitement commun de rencontrer quelqu'un qui a un talent naturel dans une certaine forme d'art et qui n'a aucunement besoin d'être éduqué. Est-ce qu'Yvon Deschamps est un mauvais humoriste parce qu'il a débuté comme batteur?
Là où Bégin tape dans le mille, c'est la manie que les producteurs à non seulement donner des rôles, mais à donner des PREMIERS rôles à des vedettes qui n'ont rien prouvé. Pourquoi Véronique Cloutier a-t-elle déjà eu un premier rôle dans une série télé et un premier rôle dans un film si son talent est aussi moyen?
Il faut traiter les "non-comédiens" d'un façon juste et équitable: qu'ils commencent où ils commenceraient normalement s'ils n'étaient pas célèbres.»
Simon Cadieux
«Je pense exactement comme Christian Bégin (non, je ne suis pas comédien sur le chômage). Je pense, comme lui, que la performance de Stéphane Rousseau dans "Les Invasions Barbares" était celle d'un bon comédien, sans plus… Mais comme on ne s'attendait à rien de brillant, on a été surpris. Combien de comédiens "de métier" auraient pu rendre ce personnage plus crédible? Mais parce qu'on s'appelle Stéphane Rousseau, ça donne droit à un raccourci, une autoroute express vers le métier de comédien?
C'est vrai que ce doit être insultant quand tu entends à longueur de jour qu'une telle ou un tel, parce qu'il a fait un spectacle d'humour, ou eu du succès en chantant, croit qu'il vaut autant que n'importe quel comédien…
Combien de bons politiciens avec des idées ont été écartés parce qu'avec Arnold, l'élection était dans la poche? Combien de chanteurs ou chanteuses qui ont appris leur métier à la dure, qui ont un réel talent, se font voler la place par les Caroline Néron et autre Star Académiciens qui tapissent mur à mur? Laurent Paquin, animateur télé? Pitié! Normand Brathwaite chanteur? Le temps d'un clin d'oeil à un gala, dans un Bye Bye, d'accord, mais pas de là à faire un disque! Michèle Richard dans les "Gingras-Gonzalez"??! Stéphane Laporte en morning man? Les exemples comme ceux-là fusent! On a gaspillé notre temps à leur donner une chance qu'ils ne méritaient pas plus que quelqu'un d'autre.
Bien sûr qu'Einstein était un "drop-out", que Guy A. Lepage est excellent en animateur, etc. Mais Christian Bégin s'interroge seulement sur le fait que ce qui devrait être l'exception est maintenant devenu la norme. Comme si tout le monde était dans le même bateau: politiciens, chanteurs, comédiens, animateurs, olympiens, humoristes, alouette! Il s'agit d'avoir réussi à se faire connaître dans un domaine pour passer de l'un à l'autre. »
Catherine Voyer-Léger
«Je ne crois pas que le propos de Christian Bégin soit de dire que 'pour être bon' il faut avoir une formation, mais de dénoncer un peu le star system et le vedettariat qui poussent certains producteurs à engager uniquement sur la base de la renommée et non pas du talent.
Le problème n'est pas qu'on engage des gens connus pour jouer dans des films ou à la télé (certains sont bons, d'autres très mauvais). Le problème c'est que de plus en plus de producteurs et de réalisateurs refusent d'engager des gens qui ne sont pas connus. Et tout ça pourrait mener à une dangereuse standardisation.»
Véronique Martin
«Le problème avec les vedettes qui obtiennent des rôles de comédiens, c'est que c'est toujours les mêmes qui sont engagés. S'ils ne font pas partie de l'écurie PKP (on n'a qu'a penser aux participants de Star Académie et d'Occupation double qui font des films, de l'animation et de la pub) ou de l'écurie Cloutier (maintenant Novem), ils ne sont d'aucun intérêt pour les producteurs et les réalisateurs. Ce qui nous ramène à dire que ce métier est fait pour générer des revenus, pas pour découvrir de nouveaux talents.»
Pierre-Luc Gagnon
«Au sujet de Christian Bégin, sans lui donner raison, je comprends très bien sa frustration. C'est tout de même assez pénible d'assister à l'admission de plus en plus large des «comédiens» dans les séries télévisées et/ou les films. C'est un peu comme le fils à papa qui décroche le poste par contact au grand malheur d'un autre type beaucoup plus qualifié.
J'étudie présentement en journalisme à Jonquière. J'ai quitté la radio en constatant que les animateurs vedettes, aujourd'hui, ce sont les humoristes. En suivant cette logique, je pourrais devenir humoriste avec ma formation de journaliste, non?»
Jean-Pierre Becotte
«L'idée que quelqu'un s'improvise dans un métier ne m'empêche pas de dormir du tout. Si cette personne est bonne dans ce qu'elle fait, qu'elle a du talent, qu'elle fait la job comme du monde, dans les règles de l'art, peu importe le temps ni les méthodes d'apprentissage, alors je ne vois pas où est le problème!
De plus, si cette personne est mauvaise dans son métier (qu'elle l'ait appris ou non), alors elle sera sûrement blâmée. Si je m'improvise plombier et que je brise la tuyauterie, mon priprio risque fort bien de me tenir responsable et de me faire payer la facture de réparation. Dans le cas où je m'improvise cuisinier et que mes mets sont infectes, mes invités risquent fort bien alors de ne plus jamais remettre les pieds chez nous. Enfin, si je me fais journaliste et crée un documentaire sans avoir recours à toute la rigueur intellectuelle que cela exige, je suis certain que des millions de détracteurs, blogueurs et autres me discréditeront en disséquant mon oeuvre.
Le problème, à la télé, ce n'est pas le choix des comédiens, c'est le contenu. On n'a pas besoin d'un bon comédien comme Christian Bégin pour jouer un cave dans "Histoires de Filles". À la télé, on nous sert du "grilled-cheeze" télévisuel. Or, pas besoin de Serge Bruyère pour faire cuire un grilled-cheeze! Ça serait du gaspillage!»