BloguesRichard Martineau

Fin de campagne

La campagne présidentielle tire à sa fin. Qu'est-ce que les électeurs ont appris au cours des dernières semaines? Pas grand chose.

Au début des années 60, l'écrivaine Ayn Rand, auteure du best-seller The Fountainhead et chef de file de l'objectivisme, l'un des mouvements philosophiques les plus importants de l'après-guerre, rédigeait une chronique hebdomadaire dans le Los Angeles Times.

Le 7 octobre 1962, en pleine campagne présidentielle, Rand signait un texte sur les élections. En voici un extrait:

"Au cours des prochaines semaines, il n'y aura aucune véritable discussion à saveur politique aux États-Unis. Nous sommes entrés dans la saison des platitudes: une campagne électorale.

Tous les sujets importants disparaissent pendant une campagne. Ils s'évaporent dans une sorte de brouillard linguistique rempli de termes caoutchouteux, ouverts à toutes les interprétations.

Cette semaine, le président Kennedy a dit que le Parti démocrate était celui de la compassion et du progrès; alors que le gouverneur Rockfeller, lui, a affirmé que le Parti républicain était celui de la croissance et de l'humanisme. Quel parti n'affirmerait pas une telle chose? Ces lieux communs se retrouvent dans les programmes de tous les partis à travers le monde! C'est pourtant sur la base de ces formules creuses que nous devons faire un choix.

S'il y a une période durant laquelle nous avons besoin de débats d'idées, c'est bien pendant une campagne électorale. Or, c'est justement dans cette période que nos esprits se brouillent…

Qui est responsable de cet état de fait? Les électeurs. Lorsque les citoyens comprennent les enjeux politiques et qu'ils ont des convictions solides, ils exigent la même chose de leurs politiciens. Mais lorsque les électeurs ne carburent qu'à l'émotion; lorsque tout ce qu'ils veulent, c'est que quelqu'un fasse quelque chose, n'importe quoi, pour régler leurs problèmes, ils se retrouvent avec des politiciens qui parlent en termes vagues, imprécis…

Une campagne électorale n'est pas la période idéale pour enseigner aux gens les principes politiques de base. Les candidats ne sont pas des profs, ils n'ont pas le temps d'expliquer l'ABC de la politique. Ils ne peuvent que tenter de répondre aux attentes des électeurs.

La cause première du marasme politique dans lequel nous pataugeons depuis des années trouve son origine dans nos écoles, dans la façon pitoyable dont nous enseignons la politique. Si nous voulons renverser la vapeur, nous devons former un électorat éduqué et allumé. Sinon, les gens vont continuer à voter CONTRE, et non POUR…"

Quarante ans plus tard, cette chronique d'Ayn Rand tient la route. On pourrait la publier texto, sans en changer un iota. Il suffirait de changer "humanisme" et "croissance" par "sécurité", et le tour serait joué.

Plus ça change, plus c'est pareil…