BloguesRichard Martineau

Témoignage d’un pédophile

J'ai reçu ce texte que je dois absolument vous transmettre. Il n'est pas signé, bien sûr…

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"Les événements actuels concernant Guy Cloutier me touchent particulièrement.

Je suis pédophile. Pédophile abstinent, mais pédophile tout de même.
Croyez-moi, ces mots m'attristent et m'humilient en les écrivant autant qu'ils peuvent vous choquer en les lisant. Cela ne sonnent vraiment pas bien à mes oreilles! Et pourtant…

D'entrée de jeu, je vous dirai que je n'ai jamais abusé, de toute ma vie et de quelque façon que ce soit, d'une mineure. Je précise "une", car les garçons ne m'intéressent pas.

Sans avoir commis d'acte, je sais par contre avec certitude que je suis attiré, sexuellement ET émotionnellement, par des mineures. Simple à savoir avec certitude, parce que je ne l'ai pas décidé! Je ne l'ai pas choisi… C'est ma condition, et je la vie. Du moins j'essaie!

J'ai 24 ans. Je suis en couple avec une femme de mon âge, depuis 5 ans. Je travaille à un salaire très enviable pour mon âge, dans un emploi tout aussi enviable. Je n'ai pas été abusé dans mon enfance. Non, ne cherchez pas de "raisons" ou de "causes". Je ne claudique pas, l'écume à la bouche, en crognant! Je suis le jeune homme ordinaire que vous croisez le matin dans le métro.

Ordinaire? Non, quand même…

Suis-je donc un monstre profiteur? Un abuseur pervers d'êtres sans défense? Un dangereux personnage qu'il faut abattre, ou à tout le moins enfermer? Pas présentement, certes, car je n'ai rien "commis"… Mais dans 5 ans? Dans 10 ans?

Il fut un temps pas si lointain où l'on brûlait les épileptiques, les croyant possédés du démon. De nos jours, il semble que l'on tue des gens dans certains pays pour le seul fait d'être homosexuel.
Toujours de nos jours, mais cette fois-ci dans beaucoup plus de pays, le pédophile est le nouveau démon. On aimerait bien aussi les brûler vif à l'instar des épileptiques d'antan, mais il faut se contenter de la loi carcérale et des "corrections" infligées aux pédos par leurs co-détenus. Nos mains restent propres et, j'imagine, justice est ainsi faite. Ça soulage un peu, à tout le moins.

Vous voyez où je veux en venir, mais croyez-moi, je ne tente nullement d'excuser la pédophilie. Je m'oppose à celle-ci d'emblée, cependant, les pédophiles dans mon genre ne sont pas des criminels. Ce sont des gens atteints d'une pathologie qu'ils n'ont pas choisie, et qu'ils doivent refouler tant bien que mal, ce que je m'efforce de faire au quotidien et c'est un réel combat!

C'est probablement dans la nature humaine d'éloigner le plus loin de soi toute culpabilité, de passer par des justifications boiteuses pour se laver de tout blâme…

Mais que diriez-vous aujourd'hui à Samuel de Champlain dont la charmante (et infidèle) Hélène n'avait que 14 ans lors de son mariage? L'on n'oubliera pas non plus que le peuple québécois repose sur des milliers d'actes de pédophilie; les Filles du Roi n'étant pas toutes majeures, vous en conviendrez!

L'on me dira que depuis, le contexte a changé et surtout, les lois se sont adaptées… Mais les moeurs humaines et les pulsions internes évoluent-elles au même rythme que les Lois? Suis-je donc un attardé? D'accord, c'est déjà moins pire qu'être criminel.

On associe souvent l'acte de pédophilie comme purement bestial et sexuel, et l'on voit souvent les mots "prédateur" et "proie" (parce que c'est assurément plus rassurant de nous voir comme des animaux plutôt que comme des hommes).

L'on se complait à croire que l'attirance ne peut être que corporelle et l'on s'imagine le désaxé qui reluque sous la jupe de la jeunne fillette (comme si on homme "normal" ne se complait pas, naturellement, à reluquer les cuisses des dames qui passent devant lui: c'est purement masculin comme comportement, et non pas déviant…)

Outre cela, on mentionne rarement qu'au niveau émotionnel, il peut également y avoir réelle attirance. Qu'une jeune fille de 14 ou 15 ans puisse être suffisamment mature, tout en restant évidemment jeune de coeur, et que cela puisse réellement être attirant et stimulant, peut-être davantage que toute autre chose.

L'on a tôt fait d'écarter du domaine du possible qu'une réelle histoire d'amour puisse naître.

En conclusion… Avec ce courriel, aurais-je tenté d'excuser la pédophilie? Nullement. Aurais-je osé à tout le moins la justifier? Même pas.

J'aurai simplement voulu l'expliquer, car tant de préjugés malsains circulent.

La victime de la pédophilie n'est pas seulement celle qui est mineure. Mais dans notre mode de pensée, on préfère soigner l'une et enfermer l'autre.

Pour l'instant, je me contenterai donc de mener mon combat interne, en prenant bien soin de ne jamais, au grand jamais l'ébruiter. Je ne me permettrai que des courriels anonymes que l'on se réjouira de qualifier d'hypocrites pour rajouter à la bassesse de ma personne.

Mais ce sera là plutôt le plus grand geste de bravoure que j'aurai pu me permettre, dans une société où s'affirmer ouvertement pédophile est aussi risqué que d'arborer un T-shirt "I love N.Y." à Falloujah.

Et je signe donc, davantage par obligation que par fierté,

Anonyme."