Lettre d'une Internaute, Christine Gauthier.
"J'ai décidé d'avoir un enfant il y a quelques mois. J'ai 27 ans et j'attends cet enfant.
Avant, j'étais considérée comme une petite fille qui ne savait rien de la vie, une jeune naïve. Je me suis souvent fait dire «Oui, mais tu n'as pas d'enfants!» à toutes les sauces, pour toutes sortes de raison. Comme si le fait de ne pas avoir de rejeton m'amoindrissait comme individu.
Personne ne l'a vraiment dit ainsi, mais on voyait bien que ma belle-soeur, mère de trois enfants à 23 ou 24 ans,était crédible aux yeux de tous. Elle s'était "réalisée", contrairement à moi. Femme au foyer, sans diplôme d'études, vivant «à l'ancienne» en "se faisant vivre" par son mari et en occupant sa journée par des tâches ménagères, ma belle-soeur était «plus épanouie» que moi, qui ai plutôt choisi de faire une maîtrise, d'attendre d'avoir un emploi relativement stable et de pouvoir offrir un semblant de qualité de vie à mon futur enfant.
J'ai aussi attendu d'être certaine. J'ai quitté le nid familial pour étudier à 18 ans et j'ai appris comme tout le monde à payer mes termes, à économiser et à planifier. Au moins, je suis autonome et je ne vis pas seulement qu'au travers des autres.
Je ne juge pas du mode de vie de ma belle-soeur, j'expose ici les symptômes d'un monde qui, effectivement, privilégie la famille au détriment du reste.
Maintenant, je suis devenue une vraie femme aux yeux de tous car je porte un bébé en moi. Pourtant, je n'ai pas changé en quelques mois, si ce n'est que mon ventre s'arrondit.
Je suis toujours la même, mon cerveau ne s'est pas brutalement développé, mes facultés intellectuelles n'ont pas connu un boum extraordinaire.
Si j'ai décidé d'avoir un enfant, ce n'est pas pour avoir une crédibilité sociale. C'est un choix personnel, égoïste peut-être, et partagé par mon conjoint.
Mais ce n'est pas le fait d'avoir cédé à quelque pression que ce soit.
Évidemment, la maternité touche, émeut; les gens aiment naturellement les enfants. Grand bien leur fasse. Mais ce n'est pas parce qu'une jeune femme n'a pas d'enfant qu'elle n'est pas quelqu'un.
Laissons donc les gens choisir le type de vie qui leur convient, avec ou sans enfant."