BloguesRichard Martineau

L’affaire Schiavo: une question de dignité!

YVES BOLDUC sur l'affaire Schiavo:

"Ce qu'on appelle désormais l'affaire Schiavo est arrivée ce matin à un dénouement qu'on voudrait final mais qui risque de s'éterniser… En tout cas, les débats que cette affaire a soulevés exacerbent les passions.

Si je dis LES débats et non LE débat, c'est qu'il y en a plusieurs. D'abord celui du droit à la dignité devant la mort.

J'ai vécu, il y a 13 mois, l'agonie de mon père. Pas très longue: six jours. Six jours de mort lente. De lutte du corps plus que de l'esprit contre la souffrance envahissante et de disparitions temporaires dans la libération qu'apporte la morphine.

Il est arrivé un moment où nous savions, mes frères et moi que nous avions perdu notre père, qu'il ne reviendrait plus. Nous avons assistés, pendant six jours et six nuits, à cette fin de vie, ne cessant de le caresser, de lui prendre la main, de tenter de le rassurer même si nous ignorions totalement s'il nous entendait.
Quand on a cessé de l'alimenter parce qu'il ne le prenait simplement plus, s'est enclanchée la lutte finale.

Alors on nous a demandé si on voulait qu'on lui retire le respirateur enfoui dans son nez. Là ça n'aurait pas duré plus que quelques minutes. On s'est regardé et on a dit non.

Mourir de faim quand le corps refuse de s'alimenter, c'est une chose. Mourir au bout de son souffle parce qu'on le prive de l'air qu'il peut encore respirer, c'en est une autre. Nous savions que tout était une question d'heures, de jours tout au plus. Nous avons préféré vivre ces derniers moments avec lui.

Le deuil s'est fait plus naturellement. Le départ fut émouvant mais appaisant. Au fond, il s'est laissé partir quand nous avons acceptés sereinement son départ.

Il y a une dizaine de jours, ce fut le tour de ma mère de quitter cette vie. Pour elle, ce fut encore plus court. Sa maladie fut longue, mais l'agonie courte. Deux jours tout au plus, le temps que tout le monde soit à son chevet. Et puis bye, bye.

Là, on a accepté qu'on lui retire l'oxygène qu'elle n'absorbait que dans une terrible souffrance. Lucide jusqu'à la presque fin, elle nous a dit vouloir partir vite. Que son mal n'avait plus de sens, qu'elle avait mérité cette paix, elle qui a lutté si fort au cours des dernières années.

Dans les deux cas, mes parents avaient un testament biologique qui interdisait tout acharnement thérapeutique. Et mes parents étaient très croyants tous les deux. Dans leurs cas, ce n'était plus une question de morale. C'était une question de dignité, et de paix. Pourquoi est-ce si difficile à comprendre?"