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Le business de la télé

Un courriel très intéressant de BENOIT JOYAL, sur le fonctionnement de la télé et la valeur marchande des vedettes:

"Soyons pragmatiques un instant et regardons comment fonctionne la télé, ici au Québec comme partout ailleurs. Qu'est-ce que ça prend pour que quelqu'un passe à la télé, par exemple en tant qu'invité, animateur ou chroniqueur? Du talent? De la crédibilité? Des propos intéressants? Un message important?

Non. Ce qui est nécessaire, c'est que l'image de la personnalité en question ait acquis une certaine valeur auprès du public et que les dirigeants de la télé s'en soient rendus compte. Il faut simplement que ces personnes attirent l'audience tant nécessaire aux quotes d'écoutes et au coût de la publicité à faire payer aux clients des réseaux de télé. C'est juste du business.

Ce n'est donc pas une question d'âge, comme le démontre Janette Bertrand, dont on vient d'annoncer le retour à la télé. Celle qui avait été "laissée de côté" par la télé se retrouvera à la barre d'une émission l'automne prochain simplement parce que le grand succès de son autobiographie lui a permis de faire augmenter une valeur marchande qu'elle avait perdue suite à des derniers projets personnels décevants en termes de quotes d'écoute.

La SRC n'a pas donné l'animation de cette émission à Mme Bertrand par remords, pour montrer que l'âgisme n'existe pas à la société d'État ou en raison de ses larmes lors de ses passages récents à la télé mais parce qu'elle a vu en elle un bon filon.

Ce n'est pas non plus une question de message, comme l'a démontré le passage récent de Nathalie Simard. Celle qui, depuis des années, n'était plus assez intéressante pour être invitée à la télé même en tant qu'invitée occasionnelle a eu droit à une heure en prime time à l'émission de Paul Arcand simplement parce que sa sortie en public lui a permis de faire augmenter une valeur marchande qu'elle avait perdue elle aussi au fil des années.

Québecor et TVA ne lui ont pas fourni cette tribune simplement par compassion ou parce qu'elle avait un message important à faire passer, le même message anti-pédophilie pouvant être véhiculé à chaque semaine par des tas d'autres personnes sincères et crédibles, mais des personnes inconnues qui n'attireraient pas des millions d'auditeurs. Ils lui ont en fait donné cette tribune parce qu'ils connaissent le goût du public pour le voyeurisme et le sensationnalisme et savaient l'effet que cela aurait, avec une campagne de publicité bien punchée, sur leurs côtes d'écoute et la vente de leurs revues.

Ce n'est pas davantage une question de talent et de crédibilité, comme le démontrent les passages récents de Ti-Guy Émond (Ti-Guy Émond?) et Caroline Marcil, la désormais célèbre chanteuse tombée sur la glace de la patinoire pendant qu'elle y chantait les hymnes nationaux.
Comment expliquer alors leur passage récent sur le plateau de l'émission animée par France Beaudoin à la SRC? Et comment expliquer que la même SRC a cavalièrement remercié Christiane Charest l'année dernière, sinon parce qu'elle n'était plus assez rentable?

Heureusement, la vie fait parfois bien les choses, et il arrive que la valeur marchande fluctuante des personnalités agisse dans le bon sens et fasse en sorte que les injustices sont réparées et que la légèreté et le vide ne soient pas les seuls critères de sélection. Le retour de Mme Bertrand à la télé le prouve et permettra au public de bénéficier de son talent et de son expérience.

Et la passage ridicule de Ti-Guy Émond à Bon baisers de France permet d'espérer qu'il ne prendra plus la place d'un invité beaucoup plus intéressant pour un certain temps…"