STÉPHANE LESSARD:
"Il est clair que pour defaire un pays comme le Canada (et avoir la reconnaissance rapide et essentielle de pays comme les États-Unis), 50% + 1, c'est pas les gros chars. C'est democratique, mais ce n'est pas un message clair.
Historiquement, une séparation, ça se fait quand le peuple a faim et est brimé, mais pas quand les gens ont deux chars, un chalet, une maison, le hockey du petit, le soccer de la petite, le frigo plein, etc.! La séparation telle que présentée par nos fossiles indépendantistes possède toujours ce relent de frustration et de ressentiment: un nationalisme victimisateur qui s'ancre dans la tête des gens.
Une des raisons fondamentales de vouloir accéder à l'indépendance est toute simple: nous sommes différents et nous voulons posséder tous les leviers nous permettant de nous affirmer et de rayonner. Ce n'est pas pour le cash. Les Ontariens en ont deux fois plus par habitant, ont deux fois moins de dettes par habitant et travaillent 30 % de plus. Les 47-54 ans ont moins de 50 000 $ en moyenne d'épargne au Québec alors que la moyenne ontarienne est de plus de 100 000 $. Eux sont attachés au Canada, c'est normal. Ils ne sont pas plus cons pour autant.
Cela dit, si devenir indépendant veut aussi dire avoir un parti redevable à la gaugauche plaignarde et quémandeuse et aux syndicats qui vont descendre dans la rue au moment où les autres se serrent les coudes pour amortir les chocs (et il y en aura: la dette cumulée sera étouffante, mieux vaut être prêt), on serait encore mieux d'attendre que de subir la honte de voir la planète rigoler devant le spectacle d'un jeune peuple qui regrette son indépendance et qui retourne le "produit" au "vendeur"!"
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CLAUDE VAILLANCOURT:
"On parle d'un parti politique, donc, en principe, de gens qui partagent une façon de voir les choses. Si des gens qui se réunissent pour promouvoir une cause aussi fondamentale ne sont pas capables d'être plus de trois sur quatre à donner leur confiance à leur chef, il y a un problème.
Au niveau de la population en général, c'est autre chose. Il y a plus de diversité. C'est vrai que créer un pays avec 50 % + 1, c'est problématique. Mais ne trouvez vous pas qu'il tout aussi problématique pour les fédéralistes de nous maintenir dans le statu quo alors que ce sont eux qui ont à peine obtenu plus de 50 % des voix en 1995?
Si le mécanisme de la démocratie avait fonctionné convenablement, le résultat de 1995 aurait dû mener vers une solution de compromis qui aurait réglé les choses une bonne fois pour toutes. Un peu comme le voulait l'accord du lac Meech après le référendum de 1980 et dont le résultat était pourtant beaucoup plus clair.
Vous connaissez l'Histoire aussi bien que moi, vous savez qui a torpillé ce très timide compromis qu'était Meech. Vous connaissez aussi le résultat du référendum sur l'accord de Charlottetown, qui était un compromis sur un compromis.
Le ROC se satisfait de 50 % et des poussières pour maintenir le système actuel, alors en l'absence de compromis honorable possible, il faudra se contenter de 50 % et des poussières, s'il le faut, pour briser cette impasse.
Malgré toutes les lois sur la clarté qui pourront être votées, l'histoire a pourtant clairement établi les règles. Si vous ajoutez à cela que le camp du changement est toujours désavantagé dans ce genre d'exercice.
Le camp du changement, ça ne vous rappelle pas quelque chose? Récemment, la France nous a donné un autre bel exemple du fardeau qui incombe aux tenants du oui lors de consultations visant à changer les règles établies. Il est beaucoup plus facile de faire peur à quelqu'un, que de le rassurer.
Voilà une raison supplémentaire en faveur du 50 % + 1, sinon c'est l'impasse. Si seulement Bourassa avait eu du cran, on en serait pas là aujourd'hui. Je ne dis pas qu'il aurait dû faire la souveraineté si ce n'était pas sa conviction profonde, mais une chose est sûre, il possédait un rapport de force qu'aucun autre premier ministre québécois n'a jamais eu pour provoquer un changement fondamental au Canada et il a croulé sous la pression. On en paie encore le prix aujourd'hui."
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PHILIPPE LAMBERT:
"Dans les dernières heures, j'ai entendu cette farce sur le 50 % +1 et le 76 % plusieurs fois. Svp dites-moi que c'est une farce et que vous comprenez que ça n'a rien à voir.
Un vote de confiance, c'est un coach qui demande à son équipe: "Suis-je le bon leader pour vous diriger dans le prochain match, dans la prochaine bataille?"
Tu demandes à ta propre gang de volontaires s'ils veulent toujours te suivre. Dans ce contexte, 10, 15 ou 20 % de "contre", c'est beaucoup plus que ce que la plupart d'entre nous serions capables de supporter. Tu demandes à ceux qui en théorie pensent comme toi s'ils pensent encore comme toi…
Une élection ou un référendum, ce sont des débats contradictoires. Il y a des groupes d'adversaires organisés, des débats publiques, des oppositions. Dans ce contexte, la majorité absolue, c'est la seule voie démocratique."