Courriel de David Gagnon concernant mon texte Feu l'objectivité
C'est comme le cas des juges au Canada et aux États-Unis.
Au Canada, les juges se cachent derrière leur devoir de réserve, il est très difficile de savoir de quelle idéologie politique ils se réclament.
Aux États-Unis, on est moins hypocrites, on sait que les juges sont politisés et personne ne s'en cache. Quand on confirme un juge à la cour suprême devant le sénat on lui pose des questions politiques, on veut savoir ses opinions, s'il est de gauche ou de droite.
Le résultat: les États-Unis ont un système plus transparent. Leurs juges sont tous objectifs mais l'objectivité peut s'exercer avec une vision de gauche ou de droite.
Au Canada, on pourrait nommer un juge ultralibéral ou ultraconservateur avec une influence majeure sur la cour suprême et personne ne s'en rendrait compte parce que ce juge se cacherait derrière son devoir de réserve.
L'obligation, mise en place par Harper, pour obliger les juges à passer devant un comité parlementaire est un pas dans la bonne direction par contre.
D'accord avec ces propos. D'ailleurs, ceux qui croient que les États-Unis sont une sorte de dictature ne comprennent rien (surprise, surprise) au système gouvernemental américain.
Là-bas, les juges de la Cour Suprême doivent passer un test assez corsé avant de décrocher leur poste. Ils ne sont pas nommés automatiquement! Ils doivent défendre leurs points de vue devant un Comité, prouver qu'ils n'ont aucun biais, etc. De plus, le Sénat est ÉLU et le Président doit souvent négocier avec un Congrès qui lui est hostile.
Alors qu'au Canada, le Premier Ministre a un pouvoir énorme, proche de la monarchie. Il nomme les juges, il nomme les sénateurs e il ne rend des comptes à aucun Congrès… Bref, il est presqu'omnipotent.
Le système gouvernemental canadien est beaucoup moins démocratique que le système américain, qui lui, est basé sur la notion d'équilibre des forces (ce qu'on appelle le "checks and balance").
Qui dit que les juges ne répondent pas au test en fonction de ce que le congrès veut bien entendre?
Si tel était le cas, ça ne serait pas tout autant hypocrite.
De plus le Président qui négocie avec le Congrès, y a peut-être qu’à cet endroit où il négocie, pour le reste il s’impose.
Le sénat et le congrès ne sont pas des blocs monolithiques. Quand un candidat au poste de juge à la cour suprême se présente devant le sénat il a devant lui des républicains et des démocrates, donc un ne peut pas vraiment se contenter de dire ce que « le sénat » veut entendre.
Surtout, comme je l’ai dit, il n’existe pas de devoir de réserve chez les juges aux États-Unis. Ces derniers ne se privent pas de faire des conférences dans les universités ou de parler aux journalistes.
Quand un juge passe devant le sénat, toutes ses déclarations sont passées au crible.
Personne n’est dupe aux États-Unis, on sait que les présidents démocrates nomment des juges libéraux et les présidents républicains nomment des juges conservateurs (sauf dans le cas de Nixon peut-être).
Pour le reste, le président américain à BEAUCOUP moins de pouvoir que nos premiers ministres. En fait, le président ne peut pas imposer grand chose sans avoir l’appui du sénat ou du congrès. Le pauvre Bill Clinton avait du faire des tonnes de compromis pour satisfaire le congrès à majorité républicaine. Un président n’a que des pouvoir exécutif alors que les premiers ministres canadiens ont l’exécutif et le législatif et surtout, aucun checks & balances (contrairement aux États-unis).
Non sérieusement je ne vise pas Johanne – juré – mais je veux juste dire qu’il y a beaucoup de gens qui ont une mauvaise opinion des USA sans connaitre les détails.
Personne ne dis que le système ( politique et/ou législatif ) aux USA est parfait, mais il y a des avantages sur notre système.
C’est plus transparant et plus juste, mais pas parfait.
M.Gagnon,
Un juge qui aspire à la Cour Suprême n’est -il pas plus prudent dans ces déclarations sachant qu’elles seraient passées au crible?
Que je suis donc soupçonneuse.
M. Leblanc
C’est ce que je suis en train de faire, essayer de connaitre les détails. Mais c’est vrai vous ne me visez pas.
Aux États-Unis au moins trois candidats très conservateurs ont passé à travers le « crible » en question en répondant de façon très évasive aux questions du comité: Clarence Thomas, nommé par Bush père, un mec aux positions de droite, impliqué à l’époque dans une affaire de harcèlement sexuel d’une subalterne (Anita Hill), John G. Roberts et Samuel Alito.
Il semble bien que ce soit bien plus les appartenances politiques et idéologiques des comités d’examen des nominations qui décident de l’issue des audiences de confirmation des « choix du Président », bien plus que les non-réponses données à leurs questions.
Une chose est certaine: pas un candidat ne dévoile s’il sera « de gauche ou de droite ». Ce n’est pas quelque devoir de réserve qui occulte son jeu mais simplement la prétention qu’il jugera chaque cause selon ses mérites dans le respect de la Constitution gna gna gna…
Au Canada, un politicien qui choisit un juge de la Cour suprême a tout de même des comptes à rendre. Il y a une personne qui est imputable. Les éditorialistes surveillent et critiquent ses choix en s’appuyant sur les décisions et opinions du magistrat choisi par le passé.
Ainsi, quand Madame la juge Beverley McLaughlin a été nommée, on connaissait très bien sa tendance à des jugements « by the book », alors que Rosie Abella, elle, était connue pour ses décisions progressistes.
Je trouve significatif que ce soient des politiciens et des commentateurs qui ne cachent pas leurs positions de droite qui insistent sur cette prétendue nécessité de soumettre la nomination des juges à un comité parlementaire.
On sait que la composition de ces comités est régie par le gouvernement.
Veut-on donner une apparence de non-partisanerie au processus et supprimer un niveau de plus d’imputabilité?
Harper réclamerait-il cela s’il n’était pas au pouvoir?
Je ne sais pas.
Une chose est claire.
Parce qu’elle est au-dessus des calculs politiques face à une droite montante, la Cour suprême canadienne a rendu depuis quelques décennies certains jugements plus courageusement favorables aux droits et libertés que certaines décisions d’instances judiciaires inférieures ou, surtout, que certains choix d’assemblées législatives élues, au provincial et au fédéral. Et ce dans des dossiers où la droite recueille facilement des votes – pensons au droit à l’avortement, au mariage entre conjoints de même sexe, etc.
La Cour suprême a tenu tête à des mouvements comme la contestation des droits des femmes et des enfants par le lobby masculiniste, en matière de pensions alimentaires notamment.
Ce qui a amené la droite à hurler que la CSC se comportait comme un gouvernement et à faire de sa mise au pas un enjeu électoral en « redneck country ».
En fait, c’est sur la Charte des droits et libertés que s’appuie la Cour suprême.
Ce sont ces droits et libertés qui sont dans le collimateur.
Je crois qu’il faut lire les propositions de Harper – et des commentateurs conservateurs en général – comme autant de tentatives d’assujettir les juges au pouvoir d’un Parlement qu’ils contrôlent, que le Parti conservateur soit au pouvoir ou dans l’Opposition, sans plus d’égards aux principes de la Charte.
Inquiétant.
Je pense que la république est une forme supérieure et plus avancée de gouvernement que la monarchie, même constitutionnelle. Il serait temps que le Canada devienne une république et rompe tous ses liens avec la monarchie britannique.
Est-ce que vous souhaiteriez voir le Parlement paralysé pendant des mois par un sénat élu pour une affaire de fellation entre le PM et sa Gouverneur génitale?
C’est ce qui explique un peu (trop absurde j’en conviens) pourquoi le PM a plus de pouvoir qu’un président américain.
Le fait que toute personne souhaitant obtenir un poste de ministre ici doit être élu fait toute la différence.
Aucun Américain n’a voté pour Rumsfeld ou Rice.
La république américaine a donné beaucoup de pouvoir à un seul homme pour que les colons ne soient pas dépaysés de la monarchie. Les autres instruments sont la pour le surveiller, à la base.
D’ailleurs, techniquement, une république n’est pas une démocratie. Ce n’est pas le peuple qui décide, le peuple vote pour la personne qui décide.
Le fait qu’un premier ministre doit débattre en chambre rend notre système plus transparent, selon moi.
Le parlement serait la démocratie parfaite si les députés pouvaient voter en fonction de leur électorat et non pas suivre la ligne du partie.
Il ne faudrait que dépoussiérer toute la question « monarchique » de la chose. Et que les gouvernements soient plus des coalitions de députés( ou de petits partis, comme en Israël) que des majorités absolues de partis dinosaures.
La solidarité de parti, justement, n’est-elle pas issue d’un problème de gouvernement qui ne pouvait avoir consensus au sein de son propre parti? Sans être tout à fait sûr de mon coup, la fameuse ligne de partie dont vous mentionnez, elle est née au début du siècle dernier. Elle a pour but de permettre au gouvernement de fonctionner avec un certain consensus (ou tordage de bras appelons ça comme on veut).
La preuve qu’il est difficile dans un si large territoire d’obtenir un consensus au sein d’un même parti politique!
Je suis convaincu que la ligne de partie ne date pas d’hier et qu’elle se retrouve aussi dans d’autres monarchies parlementaires. C’est pour cela que je dis que nous sommes théoriquement une plus grande démocratie.
Ceci dit je suis convaincu que cette ligne de partie date d’une présiode ou la lutte ne se faisait qu’à deux. Depuis, surtout avec l’arrivée de parti politiques régionaux (Le Reform et le Bloc) la donne a changé.
Je suis d’accord que le pays et qu’il faut avoit consensus, mais dans ce cas, comment explique-t-on que la chose se produise au provincial? (Paradis et Mulcair cf Orford)
Serait la fonction de « whip’ qui aurait traditionellement amené cet état de fait ?
Ne devrions nous pas justement revoir tout ça?