Scène

Il pleut des vies à en mourir : L’autel des corps brisés

Il pleut des vies à en mourir, de Patric’ Saucier, est la dernière partie du triptyque du Théâtre O Délire, après Johnny B., Le Tronc de Dieu (du même auteur) et L’Enfant du millénaire (d’un collectif d’auteurs, mis en scène par Saucier). «C’est la suite émotive de Johnny B., explique le comédien. Cette fois-ci, l’histoire tourne autour de la recherche du passé. Les personnages font un travail introspectif, une sorte d’archéologie personnelle.» D’Youville, jeune fille itinérante, droguée et prostituée, aura vingt ans dans une semaine. Elle a élu domicile temporaire dans une église désaffectée. Un soir, elle y trouve un homme à moitié mort. L’intrus a perdu son passé, ou plutôt, a l’impression de ne pas en avoir. Et son corps émet de la musique…

La pièce, sous son ancienne appellation de Stabat Mater, a été lue au Carrefour il y a deux ans. Une réponse positive, doublée d’une envie d’approfondir le texte, nous l’amène aujourd’hui dans le cadre de la série Nouvelle Garde de la présente édition. «C’est un spectacle très personnel, très près de moi, poursuit Patric’ Saucier. A part le côté très intuitif de la création, il y a eu comme inspiration la lecture d’un texte sur les adolescents. Dans ce texte, on expliquait que le cap de la vingtaine constituait souvent pour eux un point de non-retour. Jusque-là, les adolescents pris avec la drogue ont l’impression qu’ils pourront arrêter quand ils le désireront. Lorsqu’ils arrivent à 20 ans, ils ont tout à coup l’impression que c’est terminé, que leur vie ne leur appartient plus.» Mais il ne faut pas croire que le spectacle, mis en scène par l’auteur, a des saveurs de documentaire sur la situation des jeunes. Ça n’a rien à voir. L’histoire présentée en est une d’apprivoisement, de recherche et d’amour, dans un univers plus onirique que réel. «Il faut donner à voir au théâtre ce qu’on ne peut voir qu’au théâtre», lance Patric’ Saucier, qui a voulu pour l’occasion créer une atmosphère très intime, très près des gens. Pour donner vie à ses deux protagonistes, il a fait appel à Bertrand Alain et à Annick Beaulne. Le spectacle prend vie au Foyer du Théâtre Périscope, dans une scénographie de Jean-Marc Saumier. Une église évoquée est le lieu du huis clos entre les deux personnages. Un huis clos épisodique, étalé sur sept jours. «Les deux essaient de regarder vers l’avenir, mais le passé les retient, les attache. Elle se déconstruit, lui se construit. Ensemble, ils tenteront de ramer vers l’arrière pour comprendre. Mais la fin est très ouverte. Il n’y a pas qu’une réponse, mais plutôt quatre ou cinq possibilités de réponses. On y voit ce qui correspond le plus à soi», conclut l’auteur en soulignant à quel point ce spectacle est près de lui. Tellement qu’il ne ressent pas la nervosité, malgré la première qui approche. «Il faut dire que je m’entends bien avec le metteur en scène et vice-versa!»

Du 25 au 27 mai
Au Théâtre Périscope
Voir calendrier Carrefour international de théâtre