Scène

Traces d’étoiles

Les étoiles sont belles en ce début de saison théâtrale au Périscope… Elles brillent, réchauffent et dessinent un souvenir impérissable dans la mémoire du spectateur qui les a vus filer. C’est à un rituel de compassion et de rédemption que nous convie le Théâtre Blanc avec sa dernière production Traces d’étoiles, de Cindy Lou Johnson. Sans mélo, sans pathos. Que justesse d’émotion, de ton et de choix scéniques. Un régal pour les yeux et le coeur!

Une femme, parée de ses dentelles de noces, se perd dans une tempête après des jours de route en ligne droite. Elle est fragile, essoufflée et transie. Une oasis de fortune s’offre à sa vue et elle y pénétrera, de gré ou de force. Ce refuge, cette planche de salut ultime, est en fait la roulotte d’un homme qui en a fait son autel de l’oubli. Elle y atterrit, oiseau meurtri, et lui l’accueille. Enfermés – white out oblige – dans cet espace restreint, l’homme et la femme entreprennent la danse de l’apprivoisement. Tango qui ne va pas sans son lot de faux-fuyants et de demi vérités. Ils se dévoilent et se referment tour à tour; se rapprochent et se repoussent. Ces allers-retours entre la confidence et la méfiance, le spectateur les vit en compagnie des personnages. On veut comprendre et découvrir leurs secrets. Mais ce n’est pas l’instinct du voyeur qui est ici interpellé, mais plutôt celui de l’humain porteur de sa propre histoire.

Gill Champagne, qui signe la mise en scène du spectacle, a vraisemblablement travaillé dans la confiance. Confiance en sa propre sensibilité, en la force du texte et en ses deux interprètes, Linda Laplante et Éric Leblanc, qui le servent admirablement. Il a su créer, avec Jean Hazel aux décors et lumières et Yves Dubois au son, un environnement propice à l’éclosion de la vérité de cette pièce. Sans fla-fla. La gestuelle des personnages, qu’elle soit ample ou minimale, porte en elle toute une strate de sens et de significations. Et, fait assez rare au théâtre, Gill Champagne n’a pas craint le silence. La scène de la toilette de Rosanna est un poème bercé par le bruit de l’eau et le froissement du satin. Caressante et fortement imprégnante comme image. Comme la finale d’ailleurs…

Les choix scénographiques donnent véritablement une sensation de chaleur réconfortante. Des panneaux de toile plastique transparente évoquent cette tempête qui fait rage, mais la laine minérale qui enveloppe le tout rassemble et apaise. Il fait bon dans cette roulotte si bien organisée où toute chose est à sa place… C’est là que Rosanna et Henry s’ouvriront à la souffrance de l’autre et trouveront la possibilité de guérir enfin. Linda Laplante est touchante et vraie. Quant à Éric Leblanc, la justesse qu’il a su trouver, mélange de retenue et de vulnérabilité qui sied parfaitement au personnage, est bouleversante.

Deux êtres, marginaux à leurs façons, asociaux, qui se reconnaissent dans leurs blessures. Espoir. Rédemption. Délivrance. Salut. Se perdre pour mieux retrouver son chemin par la suite. On veut bien y croire…

Jusqu’au 10 octobre
Au théâtre Périscope
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