Les Femmes savantes : Le fard d'alexandrin
Scène

Les Femmes savantes : Le fard d’alexandrin

Le Trident débute sa saison avec un monument du théâtre français: Les Femmes savantes de Molière. Un jeu fascinant avec le rythme des vers, qui comporte sa part d’imprévu.

On nous la présente comme une spécialiste de la période classique du théâtre français. Qui de mieux que Christiane Pasquier, donc, pour mettre en scène Les Femmes savantes, de Molière, première production de la saison au Trident. «Je vous arrête tout de suite! Je ne suis pas "spécialiste" de cette période! Je dirais plutôt qu’à travers l’enseignement et la pratique, je me suis prise de beaucoup d’intérêt pour elle et que j’ai cherché à l’approfondir», explique la comédienne originaire de Québec. Peu importe le titre, une chose est certaine, la dame a son opinion bien arrêtée sur la façon dont on doit traiter les alexandrins tels que ceux que l’on retrouve dans cette comédie sur le pédantisme et l’hypocrisie, créée pour la première fois en 1672. «J’ai fait une recherche assez poussée sur le sujet, poursuit Christiane Pasquier. Il y a eu, suite aux excès de déclamations de la fin du siècle dernier, une volonté de "casser" l’alexandrin. Le besoin de se le réapproprier dans la modernité est passé par là. Maintenant, il y a un retour à la fidélité, à la musique de l’alexandrin. L’énergie du vers porte le sens. C’est certain que le comédien doit faire une recherche sur l’émotion, mais tous les appuis se retrouvent dans le vers.» Lorsque l’on parle de la musicalité des vers, on pense immédiatement à Racine. Y a-t-il chez Molière cette même qualité? «Je me suis rendu compte que oui. Molière est plus porté vers le côté social, donc le contenu des vers est plus ouvert sur le concret. Mais la richesse et la symbiose sont tout aussi là.»

«(…) Je consens qu’une femme ait des clartés de tout,
Mais je ne lui veux point la passion choquante
De se rendre savante afin d’être savante; (…)»

– Clitandre, acte I, scène III

A prime abord, cette pièce de Molière apparaît, avouons-le, plutôt dépassée. Le regard que l’auteur pose sur ces femmes qui se croient tenues de mépriser l’amour et le mariage pour échapper à l’infériorité de leur condition n’est certes pas des plus visionnaires… La structure de la pièce est solide, mais son propos peut laisser songeur quant à sa pertinence actuelle. «Je ne peux pas gommer l’intention de Molière, mais j’ai observé sa résistance et en ai quêté les failles. Sa vision a été un peu courte, c’est vrai, mais ces personnages transcendent cela. Ces femmes sont tout de même cohérentes dans leurs maladresses. Qu’elles soient ridicules n’a pas d’importance», conclut Christiane Pasquier qui signe ici, entourée de onze interprètes, sa première mise en scène dans un théâtre institutionnel.

Du 29 septembre au 24 octobre
Au Grand Théâtre