Presbytère du Nord : Crise de foi
Scène

Presbytère du Nord : Crise de foi

Ce n’est pas d’hier qu’Alexis Martin nous confie dans ses pochades satiriques ses questionnements de haut vol sur la foi, la religion et la mort de Dieu. Avec Presbytère du Nord, son dernier opus présenté au Monument-National jusqu’au 3 octobre, l’auteur de Matroni et moi semble hanté plus que jamais par ses obsessions spirituelles qu’il exprime maintenant sur un mode un peu plus tragique. Une homélie théâtrale qui ne convainc qu’à moitié.

Mis en scène par son complice Gary Boudreault du Groupement forestier du théâtre, le texte de Martin possède pourtant des atouts qui ont fait mouche dans ses pièces précédentes: des reparties percutantes qui alternent avec des envolées virtuoses, une réflexion philosophique allégée par quelques pointes d’humour et des personnages magnétisants qui entrechoquent leurs idées et leurs drames.

Aussi habile soit-elle, cette écriture rythmée est néanmoins au service d’une logorrhée de questionnements et de rhétorique qui donne le tournis. Les échanges pétaradants sur l’endoctrinement, le vide spirituel, la charité, le fanatisme et l’amour de Dieu laissent le spectateur presque aussi fiévreux et désorienté que Gilles (David Savard), le sceptique attitré de la pièce.

Ce triangle amoureux qui confronte les destins d’un prêtre missionnaire (Roch Aubert), de son neveu Gilles et d’une jeune femme en quête d’absolu (Marie-Josée Picard) n’évite pas non plus les stéréotypes. L’opposition entre le curé charismatique qui manipule les bonnes âmes, l’agnostique révolté qui stigmatise les credos aliénants et la brebis égarée qui hésite entre les deux offre une vision un peu manichéenne de la crise des valeurs dans la société moderne.

Dans ce contexte, le metteur en scène Gary Boudreault tire quand même ses marrons du feu en évitant la surenchère. Par un traitement sobre et direct, il clarifie certains des enjeux et entretient finement le climat de tension entre les trois belligérants de ce huis clos.

Une bonne note également aux comédiens qui réussissent à rendre passablement crédibles leurs personnages archétypaux. Roch Aubert fait frémir dans son rôle de prêtre au discours équivoque, alors que Marie-Josée Picard campe habilement une fille perdue qui lutte pour rester lucide. David Savard, entre le cynisme et la rage, exprime bien la crise existentielle de Gilles, torturé par un drame vécu avec son oncle missionnaire lors d’un séjour en Haïti.
Dans un décor économe où, comme toujours, le Groupement forestier réhabilite les vertus de la rusticité, l’intérieur d’un presbytère est évoqué par quelques meubles. L’utilisation d’un écran translucide, à l’arrière-scène, permet, grâce à des jeux d’ombres et à des projections, de faire apparaître des images à connotation religieuse ou exotique. Un procédé simple qui se combine efficacement avec les ponctuations envoûtantes d’un percussionniste.

Somme toute, il y a quand même de quoi boire et manger dans ce Presbytère du Nord. Mais si le jeu, la mise en scène et la scénographie offrent aux bonnes âmes de quoi se sustenter un peu, il reste que le texte d’Alexis Martin, malgré sa prose savoureuse, nous laisse finalement sur notre appétit.

Jusqu’au 3 octobre
A la salle du Maurier du Monument-National