Jocelyne Montpetit : Pouvoir intime
Scène

Jocelyne Montpetit : Pouvoir intime

Soirée attendue que celle de Jocelyne Montpetit présentée à l’Agora de la danse jusqu’au 17 octobre. C’est que l’excellente réputation du solo Transverbero, livré par la chorégraphe-danseuse pour la première fois l’année dernière, a fait boule de neige et suscité des attentes parmi les fans de cette danseuse hors du commun qui occupe la scène seule depuis peu. Sans doute a-t-il aussi provoqué de la curiosité chez ceux et celles qui s’intéressent un tant soit peu à cette forme d’art. Tout ce beau monde ne sera pas déçu: l’artiste nous livre deux solos, dont la reprise de Transverbero, interprétés de façon magistrale (le contraire aurait été surprenant), qui entraînent le spectateur loin de ses préoccupations quotidiennes. Pourtant, la gestuelle de Jocelyne Montpetit n’a rien de tape-à-l’oil ou de facile. Elle est composée de mouvements extrêmement lents qui se brisent, comme une vague, à des moments inattendus. Surtout, on ne s’ennuie pas un instant devant ce travail pourtant très proche de la danse méditative, un genre qui est loin de faire l’unanimité parmi le public. La richesse de l’interprétation et l’immense pouvoir de concentration de Montpetit, acquis auprès des grands maîtres japonais du butô, agissent sur le spectateur comme un aimant. Comme elle le dit, elle fait sienne une danse qui puise sa source dans les états intérieurs de l’interprète. On comprend qu’elle hésite à signer des ouvres de groupe, car ce type d’interprétation ne s’acquiert qu’après des années d’entraînement.

Mais conclure que le succès du spectacle de Montpetit s’explique uniquement par le charisme de la danseuse serait porter ombrage à son travail de chorégraphe et à celui de l’éclairagiste Axel Morgenthaler. Ce dernier, qui se qualifie davantage de concepteur d’images, signe des lumières qui accentuent la sensibilité de l’interprétation ou qui mettent en valeur l’esthétisme épuré des tableaux. Oublions le charivari de couleurs, celui-ci mise plutôt sur des jeux de formes (des triangles et des cercles, par exemple) et des jeux d’ombres.

Bien que son travail apparaisse parfois davantage comme une recherche de style, il a le mérite de réjouir constamment l’oil du spectateur. Ici, la danseuse fait son entrée avec des mini-projecteurs de lumière fixés à ses chevilles, créant du coup un cercle lumineux sous sa jupe. Là, elle regarde, fascinée, des gouttes de lumière perler sur une tige de métal. De plus, Jocelyne Montpetit se sert des jets de lumière comme d’un partenaire de danse. Cela est d’autant plus vrai dans le solo Transverbero. Voir la danseuse tendre son visage vers un triangle de lumière sur la musique de La Wally fascine autant qu’émeut.

La deuxième pièce, Icône, est sensiblement de la même étoffe, mais avec une touche d’homogénéité en plus. S’inspirant du conte fantastique La Douce, de Dostoïevski, la danseuse donne l’impression de flotter sur un lac glacé tel un fantôme. C’est à la fois doux et mystérieux. Et, malheureusement, trop court.

Jusqu’au 17 octobre
A l’Agora de la danse
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