Pierre Prince : Le petit bonheur
Scène

Pierre Prince : Le petit bonheur

A New York, les comedy clubs sont depuis longtemps les repaires privilégiés de toute une faune qui aime rire, prendre une verre et finir les soirées en toute convivialité. Dans ces petites boîtes bien urbaines, où la scène se retrouve presque invariablement devant un mur de briques, les habitués peuvent se dilater la rate en écoutant les gags d’un humoriste en herbe ou d’un Robin Williams venu tester son prochain spectacle.

A Montréal-les-Bains, les amateurs de stand-up comic peuvent maintenant compter sur une salle qui s’inspire des comedy clubs new-yorkais. Sans mur de briques, mais avec un rideau noir derrière une scène en mouchoir de poche, le Cabaret du Saint-Sulpice se veut le nouveau tremplin de l’humour dans la métropole.

Ces jours-ci, la petite salle de cent personnes accueille Pierre Prince et son spectacle au titre révélateur: Tout le monde a un show, pourquoi pas moi?! Agé de 36 ans, ce late bloomer, qui affronte le public montréalais avec son premier spectacle solo, fourbit depuis longtemps ses armes dans l’antichambre de notre showbiz du rire.

Scripteur pour Lise Dion et François Léveillé et coanimateur des Lundis Stand-up de Montréal, Pierre Prince parcourt également la province depuis six ans pour roder ses gags de bars en cabarets. Le résultat de ce dur labeur, loin de révolutionner l’univers du stand-up, débouche sur un spectacle plutôt convenu qui comporte quelques bons moments.

Marié et père de deux enfants, vivant avec la même compagne depuis 17 ans, Pierre Prince a une bouille débonnaire qui est à l’image de son humour convivial et sans prétention. S’inspirant surtout des anecdotes de son vécu familial et banlieusard qu’il traficote allègrement, ses enfilades de blagues ont résolument une orientation grand public.

Sa petite vie de couple, ses problèmes d’orthodontie à l’adolescence (ses broches mal ajustées faisaient des flammèches!), ses relations avec ses enfants et ses rapports aigres-doux avec sa mère sont autant de sujets qui alimentent la logorrhée de cet humoriste du quotidien.

Néanmoins, pendant cette prestation d’une heure et demie sans entracte où chaque phrase a son gag, l’humour de Pierre Prince connaît de nombreuses baisses de régime et tombe régulièrement dans le cliché. Ses blagues sur les ados amorphes, les premières blondes, le déclin de la libido dans le couple ou les belles-mères, ont souvent quelque chose de déjà entendu.
On peut également reprocher à l’humoriste sa tendance à naviguer entre deux eaux. Avec des gags juste assez sexistes, racistes ou blasphématoires pour titiller les spectateurs friands de ce genre d’humour, mais pas trop corsés non plus pour éviter de choquer un auditoire politiquement correct, Prince semble vouloir se rallier tous les publics. Ce qui banalise inévitablement son discours.
Dans ce contexte, ses talents d’observateur comique, même s’ils sont manifestes, ne suffisent pas à donner à son spectacle une signature vraiment distinctive. L’humoriste, qui souhaite faire la salle du Gesù dans un proche avenir, a donc encore du travail à accomplir pour justifier sa place dans la cour déjà bondée de nos vedettes de l’humour.

Jusqu’à la fin novembre
Au Cabaret du Saint-Sulpice