Scène

Mark Morris : Corps célestes

Naguère enfant terrible de la danse américaine, le chorégraphe MARK MORRIS semble s’assagir avec la quarantaine. Sa compagnie sera à Montréal, la semaine prochaine, pour ouvrir la deuxième édition de la série contemporaine des Grands Ballets Canadiens.

L’une des plus importantes compagnies de danse moderne des États-Unis nous rend visite pour la première fois. Le Mark Morris Dance Group sera sur la scène de la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts, le dernier week-end de novembre. Son spectacle ouvre la deuxième édition de la série contemporaine des Grands Ballets Canadiens (GBC).

Le principal attrait de cette compagnie fondée au début des années 80 par le chorégraphe Mark Morris, aujourd’hui établie à New York, réside dans la présentation de courtes chorégraphies où s’entremêlent les techniques classiques mais surtout modernes. Cette caractéristique explique sans doute pourquoi le directeur des GBC, Lawrence Rhodes, qui aime ce mélange, a jeté son dévolu sur elle. Mais il y a plus: la troupe composée de 18 interprètes, dont le chorégraphe, évolue sur une musique jouée et chantée par un groupe de musiciens et de chanteurs installés dans la fosse.

Contrairement à une majorité de chorégraphes qui inventent les mouvements avant de choisir la musique, Mark Morris s’inspire d’abord de ce qu’il entend. «La musique a toujours été une source d’inspiration majeure dans mes créations», dit Morris, rejoint au téléphone à New York. «Souvent, je me passionne pour des musiques porteuses de drames passionnels. Elles parlent d’amour, de religion et de mort.»

Ses choix musicaux sont multiples: ils vont de la musique baroque aux chants folkloriques en passant par la musique classique. Le programme de musique montréalais de Morris comprend des oeuvres de Monteverdi, Dvoràk et Lou Harrison, notamment, un contemporain à qui il voue une grande admiration.

Adolescent, Morris a été initié à la danse russe et espagnole, entre autres. Durant sa carrière, il a monté des ballets inédits pour le San Francisco Ballet, le Ballet de l’Opéra de Paris et l’American Ballet Theatre. Aujourd’hui, ses chorégraphies révèlent, par petites touches discrètes, son goût pour la danse d’ailleurs. Ne cherchez pas les pointes dans ses ouvres, les interprètes dansent très souvent pieds nus. Pour lui, il ne fait aucun doute que sa troupe fait dans le contemporain même si, parfois, elle emprunte la structure des oeuvres classiques. «L’une de ses grandes forces, c’est la diversité de son répertoire (qui comprend une centaine de chorégraphies). Ce qu’elle livre à Montréal en est un bon aperçu.»

Selon la description fournie dans le dossier de presse, les ouvres apparaissent parfois un brin ésotériques, parfois un brin humoristiques, et parfois un brin audacieuses. The Office, par exemple, fut créée à l’origine pour une troupe de danse d’origine balkanique de l’État du Wyoming. Dans le trio humoristique A Spell, Mark Morris est vêtu d’une tunique rose et d’ailes en styromousse. Il virevolte autour d’un couple d’amoureux. Dans Grand Duo, la troupe au complet se démène sur une musique endiablée. Enfin, la pièce I Don’t Want to Love réserve une belle surprise: musiciens et chanteurs, dont deux ténors et une soprano, accompagnent les danseurs sur la scène.

Chez les critiques américains, on dit que Morris incarne l’enfant terrible de la danse moderne en raison de ses frasques commises surtout en dehors de la scène. Une étiquette autrefois justifiée, selon le chorégraphe, mais qu’il balaie aujourd’hui du revers de la main. «Je suis un artiste et je fais ce métier depuis vingt ans, ce qui prouve le sérieux de mon travail, dit-il d’un ton exaspéré. Je laisse le soin au spectateur de juger mes ouvres. L’important, c’est qu’il assiste au spectacle sans arrière-pensées avec, comme seule préoccupation, de se laisser porter par ce qu’il va voir.»

Sa compagnie saura-t-elle faire mentir les mauvaises langues qui prétendent que la danse moderne new-yorkaise est démodée? A vous d’en juger.

Les 26, 27 et 28 novembre
Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts
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