Mentire : Masques et attrapes
Scène

Mentire : Masques et attrapes

Mensonges, tromperies et quiproquos: les enfants adorent. Et comme c’est le ressort des genres comiques – commedia dell’arte, farce et comédie moliéresque -, l’idée était belle de puiser à cette tradition pour leur offrir un divertissement sur mesure. Mentire est une cocréation de deux compagnies, le Théâtre de la Vieille 17 et le Théâtre populaire d’Acadie, auxquelles il faut ajouter trois autres producteurs (le CNA, les Coups de théâtre et le Théâtre du Frêne, de Paris). Cela fait beaucoup de monde, mais hélas! cela ne donne pas un grand spectacle.

C’est pourtant un «beau» spectacle. Devant un superbe ciel bleu, le décor de Luc Rondeau est constitué de quais de bois et de poteaux rayés grâce auxquels on reconnaît Venise, espace nu qui fait signe au tréteau des saltimbanques. Avec ses costumes colorés et ses masques, Luce Pelletier contribue à cette réussite scénographique.

Mais alors? Signé Robert Bellefeuille et Louis-Dominique Lavigne, auteur aguerri s’il en est, le texte m’a semblé paresseux, si ce n’est quelques jeux de mots suscités par la confusion langagière de Tartaglia («sous-lieutenant en chef» devient «sous-vêtement en chef», titre dont s’enorgueillit le pauvre bigre). Quant à l’intrigue, sa simplicité convient très bien aux enfants, qui raffolent des bastonnades, mais elle n’apporte guère de surprises: Arlequin invente un capitaine étranger à Madame Pantalone, sa patronne en mal d’amour. O hasard! un faussaire qui a eu vent de la fortune de la dame se présente déguisé en capitaine, que les autres veulent démasquer, mais qui n’est pas le vilain que l’on croit. Rien de bien neuf sous le ciel d’Italie…

Ce sont donc essentiellement les jeux de scène qui amusent, mais les trouvailles sont minces de ce côté, dans une mise en scène (de Robert Bellefeuille) qui pourtant veut laisser toute la place au travail du comédien. Si les types de la commedia dell’arte sont fidèles à eux-mêmes (Pantalone avare, Arlequin soucieux de sa panse), le choix de féminiser deux rôles, le Dottore et Pantalone, m’a laissée perplexe. Si cela fonctionne pour la doctoresse d’Esther Beauchemin, on ne voit guère ce qu’il y a de féminin dans la Pantalone de Ginette Chevalier: ses déhanchements lubriques et sa voix rocailleuse sont en tous points masculins, si bien que j’ai pensé que le rôle était défendu par un homme qui n’arrivait pas à jouer un personnage de femme! Les autres se tirent mieux d’affaire, en particulier Luc LeBlanc en Arlequin, qui excelle dans les cabrioles.

Soyons honnête: le spectacle n’a pas semblé déplaire aux écoliers de neuf à douze ans qui, bon public, ont ri volontiers aux moments opportuns, et chaleureusement applaudi. C’est peut-être l’occasion d’initier les enfants à la tradition théâtrale et au jeu masqué, dont le Théâtre de la Vieille 17 a une expertise indéniable.

Maison Théâtre
Jusqu’au 22 novembre