Jeux de fous : L’âme à la tendresse
La direction de l’Agora de la danse a confié un mandat complexe au chorégraphe Paul-André Fortier: créer une danse capable de captiver un jeune public. Celui-ci monte donc une version pour les enfants, et une autre pour les grands, présentée à l’Agora, jusqu’au 28 novembre. Cela donne Jeux de fous, une chorégraphie hybride, souvent intéressante, mais moins survoltée qu’on ne l’aurait d’abord cru. Comme si la sagesse avait le dernier mot sur la jeunesse, la tendresse sur le rudoiement. Ainsi, les personnages évoluent sur une vaste scène presque nue, dans des séquences évoquant parfois des images de bédé de science-fiction. L’instant d’après, les voilà qui livrent une danse esthétique, épurée, parfois tendre, collée à la signature habituelle du chorégraphe.
Ce changement de rythme et de ton affecte toutefois peu la structure de la pièce. En effet, il y a peu de temps morts dans ce Jeux de fous mené rondement par les trois danseurs (Emmanuel Jouthe, Eve Lalonde et Ivana Milicevic). Paul-André Fortier a fait appel à des jeunes de la relève pour leur dynamisme débordant et leurs idées audacieuses. Excellente initiative: c’est sans doute à eux que l’on doit les passages les plus loufoques et les plus physiques.
Mais le principal attrait de la pièce demeure la gestuelle du chorégraphe: de multiples jeux de pieds et de jambes qui donnent envie au spectateur de se mêler de la partie. Il s’en dégage une énergie rafraîchissante rappelant Entre la mémoire et l’oubli, créée par Fortier pour Montréal Danse, il y a trois ans.
Chorégraphes et danseurs ont beau dire que la danse actuelle est accessible en raison des interprétations multiples que l’on peut en tirer, elle verse souvent dans un langage hermétique. Malgré sa volonté de toucher un grand public, Paul-André Fortier n’échappe pas à cette règle. Le choix musical de sa pièce y est sans doute pour quelque chose. Le compositeur Gaétan Leboeuf signe une musique parfois poignante, comme le magnifique morceau de guitare électrique servi en introduction, mais pas assez enlevante. Celui-ci a préféré miser sur une musique actuelle plutôt que sur une musique techno, par exemple, qui aurait mieux convenu au propos de la pièce. Les plus zen aimeront sans doute, les âmes d’ado resteront sur leur appétit.
Jusqu’au 28 novembre
A l’Agora de la danse