Diane Miljours : Pari Québec
Scène

Diane Miljours : Pari Québec

Après seulement un mois au poste, rue Saint-Urbain, la nouvelle directrice générale du Centre des auteurs dramatiques (CEAD), Diane Miljours, peut avancer une chose: «Je suis arrivée dans un organisme en très bonne santé. On sent qu’au-delà du boulot, il y a un but commun dans cette maison.» Ce but, c’est le soutien, la diffusion et la passion du théâtre québécois.

Avant de succéder à Jacques Vézina au CEAD (ce dernier est maintenant au Théâtre d’Aujourd’hui, avec René Richard Cyr), Miljours a été responsable des arts de la scène, au Centre culturel canadien de l’ambassade du Canada, à Paris. «J’ai vécu en France durant plus d’une décennie, dit-elle, et j’ai réalisé à quel point le théâtre québécois était apprécié là-bas. Les textes de certains de nos auteurs, tels Normand Chaurette, Daniel Danis, ou Suzanne Lebeau, sont en demande. Je crois que les Français sont surpris de voir la diversité des niveaux de langue et la variété des écritures provenant du Québec. Contrairement à la dramaturgie contemporaine en Europe, le théâtre québécois raconte encore une histoire. Et moi, j’aime ça, me faire raconter une histoire.»

Diane Miljours a eu 50 ans en juin dernier. Elle a décidé de revenir au Québec pour se lancer de nouveaux défis, mais aussi parce qu’elle sentait qu’il se passait «des choses uniques» de l’autre côté de l’Atlantique. Surtout avec la relève. «Au dernier Festival de théâtre des Amériques, cela m’a sauté aux yeux en assistant aux spectacles en marge de la programmation officielle. Il y a une richesse et une abondance de nouvelles paroles dans la création québécoise. Malgré un contexte économique difficile, les jeunes de 20 à 35 ans persistent à écrire des pièces, et n’hésitent pas à prendre la tribune. Pour la jeune création, c’est beaucoup moins morose qu’en France.»

Si ce foisonnement de nouvelles voix peut s’expliquer, culturellement, par le désir d’expression des Québécois, Miljours pense aussi que notre théâtre récolte ce qu’il a semé dans les années 80. «A la section Écriture de l’École nationale de théâtre, par exemple, on découvre chaque année des dramaturges de talent. Trois finissants de 1997-98 ont été choisis pour l’édition en cours de la Semaine de la dramaturgie. Ils ont droit à la même tribune que Michel Marc Bouchard ou Jean-Pierre Ronfard. Et les auteurs connus ne se sentent pas menacés par l’écriture des cadets, comme Wajdi Mouawad ou Geneviève Billette. C’est un signe de maturité pour le théâtre québécois.»

Ni association ni corporation, le CEAD n’a pas son pendant en France, selon Miljours. Fondé en 1965 par cinq personnes, dont Robert Gurik, le Centre s’est donné le mandat de «briser l’isolement des auteurs». Il compte aujourd’hui 140 auteurs-membres auxquels s’ajoutent 40 stagiaires et deux collectifs. Son conseil d’administration est présidé par Carole Fréchette. Quatre employés permanents et trois autres à temps partiel forment son équipe. «C’est un organisme qui a évolué avec la société québécoise et la réalité du théâtre québécois», se réjouit Miljours.

Et quels sont les projets de la directrice? «Je veux continuer de collaborer avec des compagnies, comme on a fait cet automne avec Duceppe, pour des lectures de textes inédits. Au Québec, il y a visiblement un public pour les lectures publiques. Bien que l’idéal demeure la production de nouvelles pièces, je crois qu’il ne faut pas négliger les lectures. C’est une étape importante, surtout pour les jeunes auteurs qui n’ont pas de compagnie ou de lieu pour être diffusés.»

Le succès d’un événement comme la Semaine de la dramaturgie, organisée par Diane Pavlovic, et qui se tient jusqu’à samedi soir au Théâtre d’Aujourd’hui, confirme ces propos. D’ailleurs, lundi soir, le Fonds Gratien-Gélinas a annoncé le texte gagnant de son concours annuel Prime à la création. Il s’agit de Dévoilement devant notaire, de Dominick Parenteau-Lebeuf (la gagnante du Concours de nouvelles de Voir). Ce prix est doté d’une bourse de 10 000 $ pour la compagnie qui portera l’ouvre à la scène.

La Semaine de la dramaturgie
Jusqu’au 12 décembre
Au Théâtre d’Aujourd’hui