Les Grands Ballets Canadiens : Absolument moderne
Scène

Les Grands Ballets Canadiens : Absolument moderne

Avec leur série contemporaine, les Grands Ballets Canadiens réussissent un heureux mariage du classique et du moderne. En prime, la compagnie dévoile la programmation de la dernière saison du directeur, Lawrence Rhodes.

Les Grands Ballets Canadiens (GBC) présentent, jusqu’à samedi, trois nouvelles créations signées par de chorégraphes peu connus du grand public. Et la compagnie réussit avec ce spectacle à réjouir les amateurs de pointes autant que les amateurs de danse contemporaine. Un joli coup.

Contrairement aux précédents spectacles contemporains, où le directeur artistique Lawrence Rhodes avait fait appel à des chorégraphes-vedettes de la nouvelle danse (Édouard Lock et Ginette Laurin, notamment), cette fois-ci, les GBC se sont tournés du côté des chorégraphes qui évoluent en ballet depuis des années. Résultat: la technique classique y est exploitée au maximum et avec beaucoup de bonheur. On y retrouve moult pointes, de longues jambes féminines levées vers le ciel avec une facilité déconcertante, et des danseuses voltigeant dans les bras de leurs compagnons comme des papillons.

D’accord, les chorégraphies ne révolutionnent pas le genre, mais au moins deux d’entre elles demeurent un ravissement pour l’oil. Et… pour l’oreille, puisqu’elles sont livrées sur une musique jouée directement par des violoncellistes, violonistes et autres instrumentistes à cordes, tous cachés dans la fosse. Un bonus.

Le spectacle débute par le ballet de la Montréalaise Gioconda Barbuto. Des couples qui se forment et se déforment dans un va-et-vient léger, vaporeux et rafraîchissant. Un air de printemps flotte sur ce ballet à l’esthétique polie comme un diamant. C’est sans doute la plus belle ouvre au programme: de long tissus diaphanes se découpent sur l’arrière-scène, laquelle est éclairée par une lumière tantôt turquoise, tantôt d’un orangé vif. La chorégraphe qui a longtemps dansé pour les GBC s’en donne à cour joie dans un vocabulaire qu’elle connaît du bout des doigts. Elle signe, ça et là, quelques mouvements originaux comme ces déhanchements brusques chez les danseurs. Mais c’est surtout l’harmonie des pas avec la musique qui charme le plus. Les airs enlevants et parfois nostalgiques du compositeur Marjan Mozetich agissent sur nous comme un baume apaisant.

Le ballet suivant de l’Américain Kevin O’Day n’est pas aussi émouvant. Les couleurs sont plus sombres; les gestes théâtralisés et souvent taquins empruntent des chemins connus. Malgré tout, le travail d’O’Day reste honnête et le choix musical, d’une écoute agréable, atténue le sentiment d’ennui.

La dernière création est d’une tout autre texture. Elle s’ouvre sur une image puissante: un couple vêtu de costumes blancs d’inspiration de l’époque Louis XV (une création de Vandal) tournoie en silence pendant plusieurs minutes. Puis c’est le déchaînement des instruments à cordes et le plateau se remplit de danseurs. Des scènes fortes de ce genre, il y en a plus d’une dans cette ouvre de l’Américain Septime Webre. Le chorégraphe se permet quelques audaces mais il le fait sans jamais effrayer le public. Comme pour le ballet de Barbuto, la lumière (John Munro signe les éclairages des trois pièces), projetée de façon originale, embellit la scène de couleurs vives. Magnifique.

Jusqu’au 20 mars
Au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts
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Prochaine saison des GBC

Les Grands Ballets Canadiens ont dévoilé, la semaine dernière, leur prochaine saison. Parmi les bonnes nouvelles, notons à l’automne le retour de Giselle, revisitée par le Danois Ib Andersen, dont le rôle principal sera tenu par l’une des danseuses étoiles canadiennes, Evelyn Hart. Quelques semaines plus tard, ce sera au tour du Ballet national du Canada de nous présenter une nouvelle version du Lac des cygnes, signée James Kudelka.

Dans la série Les Grands Contemporains, la Compania Nacional de Danza, dirigée par l’Espagnol Nacho Duato, un des chouchous du public des GBC en raison du caractère latin de ses ballets, sera de passage en novembre à la salle Wilfrid-Pelletier. La troupe y livrera des ouvres inédites. La grande déception des programmes contemporains: il n’y a pas de créations de jeunes chorégraphes à se mettre sous la dent… Le directeur artistique Lawrence Rhodes, qui présente ici sa dernière saison avant de prendre sa retraite, a préféré miser sur des créateurs dont la réputation n’est plus à faire auprès des Montréalais: Jiri Kilian, William Forsythe et Duato. On pourra les voir au Théâtre Maisonneuve, au printemps de l’an 2000.