La Femme comme champ de bataille : Larmes à gauche
Dans le cadre de l’événement Vous avez dit: de quels droits?, le Groupe de la Veillée présente La Femme comme champ de bataille, pièce-choc de Matéï Visniec. La production, qui a bouleversé le public montréalais à l’automne, est à Québec pour quatre représentations.
Quelque part en Allemagne, dans un centre de santé, Kate (Cary Lawrence), une psychologue américaine, fait la connaissance de Dorra (Tania Kontoyanni), une femme bosniaque violée durant la guerre. Rencontre difficile, mais ô combien déterminante. «C’est dans cette relation que réside toute la pièce, dans l’apprivoisement de ces deux femmes, explique Tania Kontoyanni. Au fur et à mesure que la situation progresse, on passe du très personnel au très universel parce que Dorra, je crois, devient la porte-parole de ce continent qui souffre de la guerre et Kate, celle de l’Amérique du Nord, avec tous ses bons sentiments, sa bonne volonté, son désir d’aider, mais sans trop souffrir.» Depuis la chute du régime totalitaire, Matéï Visniec est le dramaturge le plus joué en Roumanie, son pays d’origine. Avec l’histoire de Dorra, il dénonce le viol des femmes comme stratégie militaire: «Et, au-delà de cela, il parle de nationalisme, de la violence que les hommes se font entre eux, du statut de la femme dans les Balkans et de la folie des Balkans, carrément.» Si la pièce avait été écrite par une femme, Tania est convaincue qu’elle aurait été très critiquée parce que Visniec prend définitivement le parti des femmes.
Ce sujet, très dur, devait être porté par un texte fort, ce qui semble être le cas. Tania avoue qu’il s’agit d’une de ses plus belles rencontres avec la dramaturgie contemporaine: «D’une façon extraordinaire, Visniec allie aspects documentaire et poétique. Et il y a des scènes qui sont vraiment très cruelles, qui vont toucher les tripes.» En fait, la douleur de son personnage est si grande que, même aujourd’hui, elle peut à peine se l’imaginer. «On ne sait pas si Dorra est Serbe, Croate ou Musulmane, fait remarquer Tania. C’est très important parce que de cette façon, l’auteur ne pointe personne du doigt. Tout le monde est coupable dans une guerre.» La mise en scène dépouillée de Claude Lemieux sert entièrement le texte et les comédiennes. Au diable les artifices, le premier rôle revient à l’émotion, percutante. Tania éprouve, pour la première fois de sa carrière, le sentiment de faire ce pourquoi elle s’est engagée dans l’art théâtral: «Cette pièce ouvre vraiment une fenêtre sur le reste du monde, elle nous fait prendre conscience…»
Du 26 au 28 mars
Au Musée de la civilisation
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