Scène

Israël Horovitz : Quand Marie est partie

Toujours intéressant de découvrir un auteur dont l’ouvre nous était jusqu’à aujourd’hui passée sous le nez. Israël Horovitz fut joué il y a plus de vingt ans à la Bordée! Pourtant, il a établi ses pénates pas si loin de chez nous, dans la ville de Gloucester, au Massachusetts. Étonnant, donc, que les pièces d’Horovitz traversent l’Atlantique avant de débarquer ici; d’autant plus que les sujets qu’il aborde s’inscrivent tout à fait dans un quotidien pas très éloigné du nôtre. Quand Marie est partie est une des douze pièces d’un cycle baptisé «Blue Collar Plays». Des êtres qui n’ont d’héroïques que leurs vies, que leurs histoires. Microcosme à portée universelle.

Marie croyait certes que le reste de ses jours s’écoulerait doucement, avec monotonie. Arrivée à soixante-dix ans, une femme remet rarement en question ses choix, sa situation. Un homme aussi, tant qu’à ça! Alors, on poursuit la route, le nombre des souvenirs accumulés étant inversement proportionnel, cruellement, aux années à venir. L’époux fait sa promenade deux fois par jour. L’enfant de quarante ans débarque à l’occasion entre deux mariages, avale quelques bols de «seafood chowder» et repart. Et Marie regarde la photo d’une jeune fille pleine d’une vie qui semble l’avoir désormais désertée. Mais Henry, le fiancé autrefois largué pour les beaux yeux de l’Américain, arrive à Gloucester. Débarquement, prise deux, quarante-cinq ans plus tard. «Je reviens te chercher…»

D’emblée, on peut apprécier la sensibilité et l’intelligence du texte d’Horovitz. Les questions qu’il soulève s’avèrent poignantes, troublantes. La vieillesse et la dégénérescence des corps sont des réalités qui frappent durement puisque personne n’y échappe. Le ton que Lise Castonguay a donné à l’ensemble du spectacle laisse par contre fort songeur. Le réalisme imposé (?) par le texte aurait gagné à être bousculé, déconstruit quelque peu afin d’y insuffler une force et un rythme malheureusement absents. Particulièrement en première partie. L’ensemble est inégal, parfois boiteux et redondant. Le jeu des comédiens en souffre. Le décor rappelle la mer qui se déchaîne, à l’image des interprètes qui semblent naviguer en eaux troubles.

Jusqu’au 1er mai
Au Théâtre de la Bordée