Une livre de chair : Destination rêve
Après avoir mis nos montres à «l’heure avancée de l’Est», voilà qu’une petite salle de l’Est de la ville nous invite à un voyage… hors du temps. Pour y parvenir, les membres, de la compagnie Persona Théâtre ont transformé la salle Fred-Barry en un hôtel décrépit, construit à la fois au milieu de nulle part, près de la mer et non loin d’un volcan, dans un no where délirant.
Une livre de chair est une «histoire d’histoires» conçue et mise en scène par Éric Jean, qui s’est inspiré d’improvisations des neuf comédiens qui forment la distribution. Empreint d’humour, le spectacle débute par un coup de foudre entre une ophtalmologiste (Adrienne) et un sculpteur (Paul). L’idylle est de courte durée et se solde par une rupture orageuse au cours de laquelle l’artiste se fait arracher les yeux. Pour échapper à la vengeance de son amant mutilé, Adrienne trouvera refuge dans un hôtel habité par une galerie de personnages étranges.
Bûchant depuis plus de trois ans sur cette création, les comédiens interprètent avec assurance des rôles qu’ils connaissent comme le fond de leur poche. Parmi eux, Hugues Fortin, Hélène Boissinot et Jacky Boileau se distinguent par leurs compositions justes de personnages exaltés.
Tirant le maximum des habiletés de chacun, Éric Jean propose un menu aussi chargé qu’un buffet chinois: violoncelle, danse, peinture, marionnettes, extraits de romans, tirades en italien et en chinois. Cinéphile aux multiples inspirations _ dont Altman et Allen _, le dramaturge a conçu avec Magalie Amyot une scénographie en trois espaces horizontaux qui évoque un travelling cinématographique. Transformés au gré de scènes et rythmés par une musique lancinante, ces lieux teintés d’onirisme (les abords de l’hôtel, la salle commune, une chambre) ajoutent au climat surréaliste mis en place par le texte de ce diplômé de l’UQAM.
En fait, Une livre de chair est un spectacle aussi léché qu’un clip, dont la mise en scène est réglée au quart de tour. Une belle histoire aux accents lelouchiens qui n’a d’autre ambition que de nous permettre d’observer les chassés-croisés de marionnettes humaines qui se débattent entre les mains du destin. Aussi, au sortir de cette fable étrange, se sent-on un peu comme au réveil: le contenu du rêve s’estompe, mais une impression agréable demeure…
Du 7 au 25 avril
À la Salle Fred-Barry
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