Yves et Martin : Deux pour un
A priori, cela ressemble à un mariage entre la folie et la raison. Mais en assistant à la naissance du duo comique YVES ET MARTIN, on se demande quelle personnalité emprunte à l’autre?
Si vous n’avez qu’une sortie à faire ce printemps, allez voir le nouveau Star Wars. Mais si vous comptez assister à deux événements, allez voir Yves et Martin! La boutade pourrait faire peur à Yves Pelletier, qui effectue un retour à la scène en même temps que George Lucas lance au cinéma Episode 1… Mais l’ex-membre de Rock et Belles Oreilles (RBO) ne s’est jamais pris au sérieux. Pourtant, son prochain show, produit avec faste par l’équipe de Spectra, est l’événement de l’année en humour au Québec.
Depuis qu’il a cessé de lire Baudrillard, après ses études en communications à l’UQAM, au début des années 80, la seule chose sérieuse qui préoccupe Yves Pelletier c’est de faire rire les gens. Après avoir écrit, réalisé et joué pour le cinéma et la télévision, il revient à ses anciennes amours, dès le 5 mai, au Spectrum.
Pelletier s’est associé avec Martin Drainville, un acteur reconnu pour son talent de comique et ses prouesses en impro (c’est une des vedettes de la LNI). Ce nouveau duo dans le monde très populaire de l’humour a baptisé le show de ses simples prénoms. (Depuis, Drainville et Pelletier ont réalisé qu’une autre paire d’humoristes circulait sous le nom de Dominic et Martin. Oups!)
D’où vient l’idée de cette drôle d’union? «On nous pose beaucoup de questions là-dessus, répond Pelletier. Ça a cliqué entre nous lorsqu’on a travaillé ensemble à l’émission L’enfer, c’est nous autres, où j’étais chroniqueur. On a des atomes crochus professionnels. Mais c’est quelque chose d’instinctif. Et cela se concrétise dans ce show.»
Les perceptions sont trompeuses. Or, généralement, elles sont nos seules guides. Allons-y donc! À première vue, Martin Drainville et Yves Pelletier ont des personnalités différentes. L’acteur comique semble sage et timide; et son collègue, tourmenté et fou braque (rien ne l’arrête devant un public, comme on l’a vu lors de son passage à L’Écuyer!).
«Yves n’est pas baveux: il est désobéissant, explique Drainville. Si vous lui dites de ne pas aller à un endroit, vous pouvez être sûr qu’il va s’y garrocher aussitôt! Alors que moi, je suis plus docile. Mais depuis que nous travaillons ensemble, j’apprends à désobéir. Et j’aime ça!»
Accidents de parcours
À l’instar de Benoît Brière, Drainville est une nature, un comique-né, parmi les meilleurs de sa génération au Québec. Pourtant, Martin Drainville ne se dirigeait pas vers le théâtre. Il étudiait en sciences pures et en physique, et côtoyait des gens à l’esprit scientifique et cartésien. «Adolescent, l’humour me fascinait, dit-il. Ce sont des artistes comme Yvon Deschamps, Paul et Paul, et Ding et Dong qui m’ont donné le goût de la communication. Puis, avec l’impro, je me suis découvert un talent d’acteur. Et je me suis dirigé vers l’art dramatique. C’est une multitude d’accidents de parcours qui m’ont poussé vers une carrière en théâtre. Et c’est un autre hasard qui m’a mis sur le chemin d’Yves.»
«Les débuts de RBO, ajoute l’autre humoriste, ont aussi été un concours de circonstances. Je faisains partie d’un groupe de l’UQAM qui déconnait à la radio, le vendredi soir. Avec le temps, on s’est rendu compte que ce n’était plus seulement nos parents et notre famille qui écoutaient l’émission. Et RBO a duré quatorze ans!»
Est-ce que l’humour d’Yves et Martin sera aussi drôle et irrévérencieux que celui de RBO? «Dans sa forme, c’est proche de RBO. Mais dans le contenu, il y a une bonne part de Martin avec son désir d’incarner des personnages.»
Le show faisait deux heures trente avant son rodage dans des salles de province. Il est maintenant réduit à deux heures. En cours de création, René Brisebois (Les Boys, Patrick Huard, Marie-Lise Pilote) s’est greffé à Drainville et Pelletier pour l’écriture des numéros. La mise en scène est de Louis Saïa qui, avant Les Boys, avait dirigé les spectacles de RBO. Pierre Labonté a conçu les décors et les accessoires; et Suzanne Harel (La Petite Vie) habillera les personnages. Parmi eux, on retrouvera monsieur Caron, le vieux grincheux inventé par Pelletier; Dave Whippet dit Le Gosseux, créé par Drainville; l’ineffable Damien Bouchard; le lecteur de nouvelles sourd-muet; et d’autres nouveaux personnages.
«Bien sûr, on garde nos personnalités propres, dit Drainville. Mais quand je suis sur scène, avec un costume et une perruque, je me permets des audaces que je n’aurais jamais dans la vie. Je ne serai pas toujours le bon – et Yves le méchant – dans le show.»
«Moi, je n’aime pas la provocation gratuite, renchérit Pelletier. Je veux faire rire les gens, pas les provoquer. Cela dit, j’adore dire les vrais noms: Rozon s’appelle Rozon, pas Bozon.»
Pour la construction des gags et des numéros, les humoristes se sont inspirés de l’actualité, mais aussi de tout ce qui les entoure. «J’ai tout le temps la switch à on, explique Yves Pelletier. J’adore observer les gens, leur façon de se présenter, leur fausse assurance qui cache une insécurité. Le personnage de Damien Bouchard m’est venu en 1989, après avoir croisé un indépendantiste qui disait: "Le pays, c’est pour 1990!" D’ailleurs, tous les discours sont du bon stock pour un humoriste. Quand j’entends des politiciens expliquer le plus sérieusement du monde qu’on va réduire le chômage chez les jeunes en éliminant le déficit, je trouve ça risible!»
Et ces jours-ci, dans l’actualité, qu’est-ce qui les inspire? Yves Pelletier: «Les conférences de presse du porte-parole de l’OTAN, Jamie Shea. Il nous explique chaque matin dans le détail où telle et telle bombe a explosé. Mais il y a plus de bonhomie que d’inquiétude dans le ton de sa voix! On est loin du général grave et sévère… C’est le Steve Flanagan de l’OTAN!»
Comme quoi la bêtise humaine n’a pas fini de taquiner les humoristes de la planète, afin qu’ils produisent de nouveaux shows.
Du 5 au 8 et du 19 au 22 mai
Au Spectrum
Voir calendrier Humour