Les Zurbains III : La vie devant soi
«On n’est pas sérieux, quand on a dix-sept ans», écrivait Rimbaud. Grâce au Théâtre Le Clou, cinq jeunes auteurs font, à leur façon, une éclatante démonstration du contraire. Version adolescente des défunts Contes urbains du Théâtre Urbi et Orbi, Les Zurbains III réunissent quatre courtes pièces de dramaturges en herbe, une création de la performeuse Nathalie Derome, ainsi qu’une autre de l’auteur Reynald Robinson. Résultat: un collage qui démontre que l’adolescence est le théâtre de bien grandes tragédies…
Être sérieux sans se prendre au sérieux, telle pourrait être la devise des créateurs de cette troisième mouture des Zurbains. Coup de foudre virtuel, vague à l’âme, paternité-surprise, quotidien de squeegies, les contes mis en scène par Benoît Vermeulen dépeignent des univers sombres, traversés de rafraîchissantes pointes d’humour.
Une savoureuse authenticité se dégage des quatre «joyeux calvaires» couchés sur papier par les étudiants Geneviève Fortin, Gabrielle Jacob-Roy, Lawrence Ko, Simon Perrotte et Marie-Claude Verdier; puis retravaillés au cours d’un stage d’une fin de semaine avec des auteurs et des comédiens professionnels. Ainsi, en apprenant le suicide de sa copine Martine, le protagoniste du premier conte, Paradise.com, lancera: «C’est juste trop, comme.» Une réplique banale, mais ô combien réaliste… Triste constat: un suicide vient clore trois des quatre contes mitonnés par ces vertes jeunesses en plein spleen.
La prose des ados se mêle habilement à celle des auteurs professionnels qui, eux, réussissent à s’adresser aux jeunes sans «faire» jeune. Le soir de la première, une chanson de Nathalie Derome sur les menstruations (!) a même été accueillie par des rires complices…
Axés sur la parole, ces contes urbains sont joués dans une scénographie discrète: scène vide, rideau blanc et téléviseurs mobiles qui présentent des extraits d’entrevues avec les auteurs. Ce dépouillement offre une grande liberté aux pétillants interprètes Marika Lhoumeau, Lucie Paul-Hus, Jacinthe Potvin, Sylvain Scott et Maxime Denommée (hilarant en grand «Jack» de 6 pieds, 6 pouces).
Notons finalement que les jeunes auteurs des Zurbains ont imaginé des personnages masculins d’une profondeur étonnante, submergés par un flot d’émotions, préoccupés d’amour, d’amitié et, même, de paternité. Les enfants du féminisme offriront-ils enfin à la dramaturgie québécoise des mâles qui ne soient ni absents, ni loosers, ni détraqués? Malgré leur noirceur, ces Zurbains laissent poindre une lueur à l’horizon…
A la salle Fred-Barry, jusqu’au 14 mai en matinées scolaires et le 13 mai à 20h30.
A la Maison des Arts de Laval, le 21 mai à 19h30.
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