Michel Boujenah : Conte pour tous
«L’enfance, qui peut nous dire où ça commence? Qui peut nous dire où ça finit?» Ces paroles de Brel s’appliquent parfaitement à la vie de Michel Boujenah. «Pour moi, il n’y a pas de différence entre un adulte et un enfant. Vieillir, c’est donner les moyens à l’enfant de s’exprimer.??»
En effet, c’est un grand enfant, heureux de l’attention médiatique, que Voir a rencontré en juin dernier, à Paris. Loin de son refuge de Saint-Paul-de-Vence, où il s’initie aux joies de la paternité (à 46 ans, ?«mieux vaut tard que jamais»), il se prépare à un automne fort occupé: il travaillera à la fois à un nouveau one man show, son septième, et au tournage d’un film qu’il a scénarisé. Comme lors de chaque nouveau projet, depuis près vingt ans, cela lui fait terriblement peur.
Né à Tunis, Michel Boujenah est arrivé à Paris vers l’âge de douze ans. Le jeune homme à la peau dorée et à l’accent méditerranéen veut se diriger vers le théâtre. Mais c’est plutôt le sentiment d’exclusion et le mal du pays qui attendent le jeune premier. Il devra rouler sa bosse pendant six ans avant de connaître le succès avec Albert, au début des années 80. Un premier one man show dans lequel il parle de lui, de son enfance, de son exil, de ses angoisses…
Depuis, Michel Boujenah, ne peut s’empêcher d’écrire sur sa vie. Et c’est par ce biais qu’il aborde ses thèmes de prédilection: la famille, ??«une obsession»; le judaïsme; l’intolérance; le rêve.
Cette semaine, ce comédien qui a connu simultanément des succès à la scène et au grand écran (Trois Hommes et un couffin) est à Montréal au Festival Juste pour rire, où il présentera son avant-dernier spectacle Le Petit Génie, pour un soir seulement, au Monument-National, le 20 juillet.
Dans ce show, Boujenah campe tous les personnages d’une épopée historique, sociale et religieuse. «Je me suis donné le défi de faire une épopée seule sur scène, dit-il. Je montre un type complètement déprimé, qui a l’impression de ne servir à rien. Un jur, il fait la rencontre d’un génie sorti d’une cannette de boisson gazeuse. Ce génie lui propose d’aller visiter le passé, à la recherche d’une époque où il se sentirait utile, et pourrait repenser l’avenir. Mais ce qu’il verra sera encore plus horrible que ce qu’il a pu imaginer…
?«Tous mes spectacles sont des fables, poursuit Boujenah. Mon objectif n’est pas forcément de faire rire, mais de raconter des histoires. Je ne cherche pas le punch line. Je suis davantage un auteur moraliste.»
Quel est son modèle? «Je ne connais pas d’humoristes de la trempe de Devos. C’est le plus grand des humoristes vivants.»
Michel Boujenah a lui aussi du talent, du charisme, de la verve et de la virtuosité. Or, voilà: certains lui reprochent de trop en faire… «C’est tout ce que veut Michel Boujenah: qu’on l’aime. Il en a fait un métier. Mais on l’aimerait tout autant s’il ne voulait pas qu’on l’aime tant», a écrit le journal Le Monde dans sa critique du Petit Génie. Qu’en pense l’humoriste? ?«Je me méfie des gens qui pensent détenir la vérité. Parmi les choses que j’aimerais léguer à mon fils, je veux lui montrer à douter.?»
Deux jours avant son spectacle solo, Boujenah va coanimer, avec Michel Barrette, le Gala du 18 juillet au Saint-Denis. Mais le comédien garde un mauvais souvenir d’une expérience semblable lors d’un Gala du Festival, en compagnie de Dominique Michel, à la fin des années 80. Il prévient donc les spectateurs québécois: «Comme animateur, je suis nul! Ne vous attendez à rien. J’ai accepté pour faire plaisir à Gilbert Rozon. Et parce que j’aime le Québec.?»
Un public averti en vaut deux…
Gala Loto-Québec
Le 18 juillet
Au Théâtre Saint-Denis
Le Petit Génie
Le 20 juillet
À la salle Ludger-Duvernay du Monument-National