Francis Monty : Avec le temps
Scène

Francis Monty : Avec le temps

La Licorne ouvre sa saison avec une pièce d’un auteur de 28 ans qui a déjà connu le succès… en Europe. En effet, Par les temps qui rouillent de Francis Monty, a vu le jour au Théâtre de Poche de Bruxelles, à l’automne 1998. À la suite d’un échange entre deux classes (l’une, de l’Université Louvain la Neuve; l’autre, de l’École nationale de théâtre du Canada), un metteur en scène belge a dirigé la création de sa pièce avec une distribution moitié belge, moitié québécoise.

C’est la même équipe (la metteure en scène Sylvie de Braeckleer, et les comédiens Christophe Challe, Anne-Marie Côté, Fabien Dehasseler, Geneviève Désilets, Istik Elbaz, Antoni Lo Presti, Véronique Marchand, Sébastien Ricard, Monica Gomes Teixeira) qui remonte sur les planches, du 7 septembre au 2 octobre, dans une coproduction du Théâtre de la Pire Espèce et de la compagnie belge La Manufacture (le même nom que la troupe en résidence à La Licorne!).

Je retrouve Francis Monty au Barbare, le rond-point de la jeune création théâtrale montréalaise, à l’heure de l’apéro. Curieusement, il n’est pas nerveux! Bien que, deux semaines avant la première montréalaise, sa metteure en scène soit toujours à Bruxelles: «Je suis plus préoccupé par ma fille de huit mois. Un enfant, ça met les choses en perspective… De toute façon, le show est rodé.»

En effet, Francis Monty a déjà assisté à 30 représentations de Par les temps qui rouillent depuis sa création. «Pour moi, c’est très important, une première production. Je peux enfin voir les forces et les faiblesses de mon écriture. Et je suis bien tombé avec Sylvie de Braeckleer, car elle a fidèlement respecté mon texte et mes didascalies.\»

Par les temps qui rouillent a comme sous-titre «pièce pour automates en plusieurs tableaux». La scène est «un lieu de passage où se croisent plusieurs personnages anonymes pris au hasard de la foule. Ils marchent pour marcher, simplement pour ne pas s’arrêter, pour ne pas penser. Marionnettes risibles, pétries de conventions sociales, aux gestes calculés, aux mots vides, ersatz d’êtres humains, (…) machines qui fonctionnent et font tourner la machine», a écrit Sylvie de Braeckleer.

«Tous les personnages ont un problème de communication, reconnaît l’auteur. Est-ce une critique sociale? J’ai des amis qui écrivent des pièces beaucoup plus engagées que les miennes. Moi, je ne nomme pas les choses. Mais je dénonce quand même. Je ne suis pas un auteur engagé, mais c’est sûr que mon écriture carbure à ce qui me fait chier.»

Parmi ces choses-là, il y a l’état de la culture en région. Originaire de Saint-Jean, Monty a produit et mis en scène un Feydeau dans sa ville natale, l’été dernier. Malgré un accueil favorable, les salles étaient vides…

«On n’avait le soutien de personne. Et je ne parle même pas de subventions. Pour l’administration municipale, la culture, à Saint-Jean-sur-Richelieu, c’est la montgolfière… En dehors du Festival des montgolfières, point de salut! Or, je pense que c’est très important de faire du théâtre de qualité en région. Il ne faut pas que ça passe seulement par Montréal.»

Pour ce bachelier de l’Université de Montréal et diplômé de l’École nationale, il est important de rester en contact avec le théâtre populaire. «J’admire une femme comme Denise Filiatrault, qui a appris sur le tas dans les cabarets et les variétés, et qui aujourd’hui réalise des films et met en scène des classiques. Elle ne se casse pas la tête à savoir comment faire: elle se lance dans le travail et fait des choses.»

Et dans quel projet fou se lancerait le jeune père de famille? \«J’aimerais faire un festival de théâtre de série B à Montréal. Je travaille aussi à un laboratoire théâtral autour de 1984, de George Orwell, pour l’an 2000.»

De Feydeau à Orwell, en passant par la création expérimentale, décidément Francis Monty porte un regard très large sur le monde.

Du 7 septembre au 2 octobre
À La Licorne
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