Scène

Harold RhéaumeÉpitaphe : Léguer son corps à la danse

Déjà apprécié comme interprète, HAROLD RHÉAUME fait de plus en plus sa marque en tant que chorégraphe. Il nous présente sa toute récente pièce, Épitaphe, créée pour le Groupe de la Place  Royale.

Le nom vous dit quelque chose? C’est qu’Harold Rhéaume s’est produit deux fois à la salle Multi dernièrement, avec Louise Bédard Danse, puis avec Le Carré des Lombes. Un danseur qui frappe par sa gestuelle précise et subtile, par une présence scénique pleine d’assurance et de sensibilité. Mais cette année, il ne danse plus pour les autres, trop occupé avec ses propres projets.

Joint à Ottawa quatre jours avant la première d’Épitaphe à Montréal, il s’exclame: «On est prêts. Ça me fait tout drôle de dire ça.» Au lieu de la précipitation habituelle de dernière minute, lui et les sept danseurs du Groupe de la Place Royale ont vécu trois semaines de répétition en salle avec tout le support technique nécessaire. Un luxe, en danse! «D’habitude, on ajoute la lumière à la fin et les danseurs doivent s’arranger pour être dedans pour que ça marche.»

Épitaphe aurait tout aussi bien pu s’appeler «Testament» ou «Empreinte». «Ce n’est pas du tout le côté morbide d’Épitaphe qui m’intéressait, précise le chorégraphe, mais plutôt le côté testamentaire, le leg qu’on laisse comme sur une pierre tombale: "Ci-gît Harold Rhéaume. J’ai toujours aimé la vie." C’est un peu ça l’idée: qu’aimerait-on laisser comme empreinte?» Il continue en fait de s’interroger sur la place de l’individu dans la collectivité, sur ce que l’un et l’autre s’apportent mutuellement. Un vaste sujet qu’il n’avait pas épuisé dans Les Dix Commandements, l’an dernier.

Constituée d’une croix sur le sol redessinée par des carrés de lumière, la scénographie contraste, par sa géométrie, avec les corps des danseurs. Un élément qui remonte à l’origine de la pièce. «Moi, quand j’arrive dans un studio vide, ça ne m’inspire pas. Alors, ce que je fais souvent, c’est que je mets des morceaux de vêtements ou une corde, quelque chose pour délimiter un lieu. Déjà, quand je place les danseurs dans ce lieu-là, ça me donne tout de suite des images de situations, de rapports, de perspectives.»

Comme il aime travailler avec des chorégraphes qui savent où ils s’en vont, il en fait autant pour ses danseurs. «J’essaie de leur donner le cadre le plus proche possible, mais, à l’intérieur de ça, ils ont toute la liberté.» Pour Épitaphe, les individus devaient se distinguer à travers la masse. C’est pourquoi il s’est inspiré de chacun pour créer sept solos avant d’attaquer la chorégraphie d’ensemble.

Après onze ans de création, Harold Rhéaume revoit son évolution. «Au début, j’étais dans mes pièces. J’avais besoin de sentir le mouvement de l’intérieur, pour développer ma signature aussi. Puis, cinq à six ans après, j’ai eu besoin de sortir, de diriger, en ayant l’espèce d’oeil extérieur qui me permettait de pousser l’interprète. C’est devenu mon leitmotiv.» Ce geste de maturité coïncide avec l’obtention du prix Jacqueline Lemieux en 1997.

Au printemps prochain, il se lancera dans une mise en scène théâtrale. Il projette aussi un film sur Les Dix Commandements. Mais pour le moment, passé le stress de la première au FIND, il a bien hâte de retrouver Québec, sa ville natale.

Du 21 au 23 octobre
À la Caserne Dalhousie
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