Raconter sur scène, en deux heures, l’Ancien Testament: projet ambitieux, mené par le fantaisiste Théâtre du Sous-Marin Jaune et son célèbre directeur artistique, le Loup Bleu, marionnette de son état.
La scène de la Bordée, transformée en un énorme castelet stylisé, abrite une quarantaine de marionnettes et cinq comédiens (Paul-Patrick Charbonneau, Lorraine Côté, Antoine Laprise, Jacques Laroche, Guy Daniel Tremblay) mettant leur folle énergie à raconter une grande et longue histoire. De la création de l’homme à la reconstruction de Jérusalem se succèdent les scènes, ponctuées des commentaires et explications du Loup Bleu; s’y glissent quelques joyeux anachronismes et allusions à l’actualité.
Souvent didactique – le rideau, une immense carte géographique, en fait foi -, le spectacle mélange les tons: les tableaux sont parfois loufoques ou ironiques, parfois sérieux. S’y côtoient aussi divers types de marionnettes (Marie José Houde): des figurines de pâte naissant sous nos yeux ravis aux personnages mi-marionnettes, mi-comédiens, en passant par les marottes et les marionnettes à gaine, le spectacle propose, en parallèle à l’évolution d’une civilisation humaine, une genèse de la marionnette.
Le dispositif scénique (Christian Fontaine), très imaginatif, transporte le spectateur dans un univers de nuages qui flottent, de montagnes qui se promènent, d’arbres et de cours d’eau qui apparaissent et disparaissent. Fait d’éléments mobiles, il joue avec la perspective, le mouvement, la lumière et la transparence.
Si certaines scènes sont des bijoux – la création, les confidences de Job, personnage particulièrement touchant, le périple d’Abraham – et certains personnages, irrévérencieux ou attachants, un mélange de culot et d’humanité – Moïse en mafioso, David enfant -, l’ensemble garde un aspect de foisonnement amusant, mais parfois un peu étourdissant. Le spectacle est étonnant, audacieux et inventif, plein d’humour et d’esprit; mais il gagnerait à être un peu épuré, afin d’unifier davantage cet ensemble forcément disparate. La tâche était – restons dans les mythes – titanesque; l’ampleur du travail réalisé, dans l’adaptation, la conception et le jeu, est herculéenne.
Jusqu’au 25 novembre
Au Théâtre de la Bordée