Critique : Les Enrobantes, cabaret décolleté pour psychanalyste plongeant
Scène

Critique : Les Enrobantes, cabaret décolleté pour psychanalyste plongeant

Dans ce spectacle du Théâtre Pupulus Mordicus, Sigmund Freud nous apparaît en marionnette. Fantaisie débridée, cette pièce nous mène au coeur de l’Autriche nazie, du cabinet du père de la psychanalyse au Cabaret de madame Guste.

Jusqu’au 29 janvier
Au Théâtre Périscope
Dans ce spectacle du Théâtre Pupulus Mordicus, Sigmund Freud nous apparaît en marionnette. Fantaisie débridée, cette pièce nous mène au coeur de l’Autriche nazie, du cabinet du père de la psychanalyse au Cabaret de madame Guste. Dans une poursuite endiablée pour mettre la main sur le manuscrit d’autoanalyse de Freud – prouvant qu’il souffre d’impuissance – se rencontrent toute une galerie de personnages. Freud et plusieurs femmes (impuissance oblige): son épouse, frustrée par des années d’abstinence, une admiratrice lui proposant ses charmes et Lola, la belle chanteuse de cabaret; deux soldats allemands, les deux «bons Aryens», dont l’un ressemble étrangement à un certain Adolf; deux fous à lier en camisole de force, en plus de Carl Gustav Jung faisant la cour à Melanie Klein. Mélange explosif et irrésistible.

À coups de bouffonneries, créées par le texte de Marie-Christine Lê-Huu et par la mise en scène de Gill Champagne, on se moque joyeusement de la psychanalyse, de la bêtise humaine et des personnages eux-mêmes. Pleine de subtilités et de plaisanteries fines, la pièce ne néglige pas pour autant la farce et l’humour grivois, tout en ménageant quelques moments touchants, par les réflexions d’un Freud vieillissant et par une superbe image finale.

Les créateurs du Pupulus Mordicus insistent: ils présentent du théâtre avec marionnettes. Si le comédien manipule la marionnette et lui prête sa voix (et même parfois son corps), il échange aussi avec elle, s’étonnant de son langage, par exemple, ou recevant des coups. Cette «indépendance» de la marionnette qui tout à coup semble s’animer d’une vie propre, en devenant presque l’égale du comédien, surprend et amuse vivement. Les quatre interprètes, Martin Genest, Anne-Marie Olivier, Pierre Robitaille et Véronique St-Jacques, jouent jusqu’à 13 personnages avec une agilité et une concentration remarquables, qui tiennent parfois de la prouesse. Ils sont habilement secondés par leurs deux musiciens, habillés en rabbins, qui accompagnent l’action en musique et en bruits.

La marionnette permet les caricatures les plus folles. Libre de toute contrainte, elle peut devenir pure fantaisie: figurer des hallucinations, voler, grimper, tomber à répétition, toutes choses difficiles pour notre fragile enveloppe charnelle. On retrouve dans Les Enrobantes, pièce adressée aux adultes, la joie et la liberté des spectacles pour enfants: le plaisir du jeu pur.