Bagne : Derrière les barreaux
Scène

Bagne : Derrière les barreaux

Après avoir créé et dansé Bagne, Pierre-Paul Savoie et Jeff Hall nous offrent la version féminine de cette oeuvre sur l’enfermement, au propre et au figuré.

«Samedi, j’étais fier», dit Pierre-Paul Savoie. Lors de cette représentation du 29 janvier dernier qui marquait le coup d’envoi de la nouvelle tournée de Bagne, il s’est laissé prendre par l’interprétation de Carole Courtois et Sarah Williams. Cette pièce qu’il a créée avec Jeff Hall en 1993, il l’a lui-même dansée pendant plusieurs années, mais ce n’est qu’à présent qu’il en est pleinement satisfait.
Pourtant, c’est avec une pointe de doute que Savoie a abordé la version féminine en 1998. «C’est la pièce à laquelle je m’identifie le plus, explique-t-il. J’avais une peur bleue que ce soit moins fort.» Au contraire, ce recul a été bénéfique. De la salle, il a repéré certaines longueurs qu’il ne ressentait pas comme interprète. «\C’est plus actif, beaucoup plus surprenant.»
Pierre-Paul Savoie est de ceux qui traînent longtemps leurs oeuvres. En 10 ans, la compagnie PPS Danse, qu’il dirige avec Jeff Hall, n’a produit que trois pièces, Duodenum, Bagne et Pôles. Son plaisir, c’est d’approfondir, « d’atteindre d’autres couches».
Le thème de Bagne, la prison, est issu de l’utilisation de la structure métallique et du grillage. «Cette pièce-là sans le décor, ça n’existe pas. C’est l’intégration de la chorégraphie au lieu scénique. Il n’y a pas un petit coin qu’on n’utilise pas.» C’est une pièce athlétique. Les danseuses doivent se soulever à bout de bras, se suspendre aux poutres. Des filles fortes physiquement et émotivement.
En créant la pièce, Savoie et Hall ne connaissaient du milieu carcéral que ce qu’ils en avaient lu. Il faut croire qu’ils ont visé juste, d’après les commentaires des prisonniers qui ont vu la pièce. «Le son du métal, les masques. En prison, il faut que tu joues un rôle.» Ce qui n’empêche pas le public général de se sentir concerné. «Les gens sont voyeurs dans ce show-là parce que c’est un huis clos. Ils se reconnaissent beaucoup dans leur propre prison.»
La notion d’enfermement physique nous renvoie, en effet, à nos entraves psychologiques.«On a le choix de vivre ouvert ou fermé», résume le chorégraphe. Un des deux personnages se montre vulnérable, l’autre résiste. Toutes les tentatives de rapprochement échouent. S’il y a beaucoup de violence dans Bagne, Savoie souligne qu’il y a aussi beaucoup de tendresse. «Les gens réagissent émotivement. C’est viscéral.»
L’intimité de la salle Octave-Crémazie devrait être propice à toutes ces émotions fortes. Avant et après la représentation, le public pourra s’entretenir avec les artistes au foyer du Grand Théâtre.
Les 15 et 16 février
Au Grand Théâtre
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