Transit – Section n.20 : La suite de l'histoire
Scène

Transit – Section n.20 : La suite de l’histoire

«L’homme est condamné à se souvenir.» Cette sentence, prononcée par Nietzsche, donne d’entrée de jeu le ton de Transit – section n. 20. L’Histoire, celle avec un grand H, mais aussi la petite, sera au coeur de cette leçon  théâtrale.

«L’homme est condamné à se souvenir.» Cette sentence, prononcée par Nietzsche, donne d’entrée de jeu le ton de Transit – section n. 20. L’Histoire, celle avec un grand H, mais aussi la petite, sera au coeur de cette leçon théâtrale. Avec cette rétrospective mise en scène par Alexis Martin, et écrite en collaboration avec Jean-Pierre Ronfard, les comparses du Nouveau Théâtre expérimental nous invitent à participer à leur jeu favori – tenter d’être sérieux – en traçant un bilan éclaté, éducatif et, heureusement, ludique des cent dernières années.
Pièce à sketchs jouée dans un espace dépouillé, meublé d’un gros conteneur à déchets, Transit – section n. 20 met en scène une succession de rencontres étonnantes et de monologues instructifs. Il y a la cinéaste Leni Riefenstahl (Martine Beaulne), qui refuse de reconnaître qu’elle a contribué à l’essor du nazisme, et Anne Frank (Sophie Dion), qui lui crache sa haine au visage; le futuriste Marinetti (Jacques Baril) et le poète Maïakovski (Jean Maheux), partageant leurs idées; un journaliste de La Pravda et un militaire américain (interprétés par Jacques Baril), incapables de coucher un mensonge sur papier. Lanoix (Michel Charette, bouffon) et Legrand (Daniel Brière, un «fendant» qui a réponse à tout) cimentent ces discussions historico-philosophique, en campant un duo de balayeurs rigolos, dont on avait fait la connaissance lors de l’atelier Aristophane Les Clones. Déjà vu mais efficace.
Avec un jeu «sloppy» qui n’aurait pas déplu à Robert Gravel, Charette et Brière (excellent pince-sans-rire) réussissent à alléger une pièce dense, voire didactique. Martine Beaulne est étonnante dans le contre-emploi d’une cinéaste fielleuse et butée. Jean Maheux offre, pour sa part, une émouvante composition en soldat qui agonise… en chantant l’hymne américain.
L’ironie n’est jamais loin avec la bande du NTE. Par exemple, une hilarante infopub pour un outil qui transforme en cube parfait tous les légumes ainsi que les crustacés – «ce légumes qui poussent sous l’eau» – nous apprend que ce bidule peut être aussi fort utile pour se débarrasser des corps indésirables. Silence et rires gênés dans la salle…
Projet ambitieux – «baveux», selon Martin -, Transit – section n. 20 humanise l’Histoire, notamment en cherchant à mettre en lumière le peu de place accordé aux femmes dans la mémoire collective. Alexis Martin a accouché d’un objet théâtral inégal, moins coincé et beaucoup plus vivant que bien des rétrospectives. La morale de l’histoire? À l’ère de la mémoire totale, tout est passage, nous dit Martin. L’Histoire n’est qu’un transit.._
Jusqu’au 19 février
À l’Espace Libre