Critique : George Dandin
Molière, on le sait, allie habilement rire et gravité dans ses comédies. La mise en scène de Patric’ Saucier, qui situe l’action de George Dandin au début du XXe siècle, cadre parfaitement avec l’esprit de l’auteur qui savait mêler la finesse de l’analyse psychologique à l’efficacité du comique de la farce.
Molière, on le sait, allie habilement rire et gravité dans ses comédies. La mise en scène de Patric’ Saucier, qui situe l’action de George Dandin au début du XXe siècle, cadre parfaitement avec l’esprit de l’auteur qui savait mêler, même au coeur des «grandes comédies», la finesse de l’analyse psychologique à l’efficacité du comique de la farce.
Patric’ Saucier renouvelle la tradition de manière enjouée. Recourant à l’expressivité du cinéma muet, misant sur le comique «mécanique» de Chaplin, le metteur en scène puise également – il le dit lui-même – à l’humour «Bugs Bunny», fondé sur la répétition, l’invraisemblance et le jeu avec les conventions. Ici, par exemple, on finit par attendre avec délices, à chaque sortie d’un personnage particulièrement malhabile, le fracas de sa chute en coulisses.
Les costumes, convenant au caractère de chacun, les maquillages de carnaval de tous les personnages, sauf Dandin, et l’éclairage du devant de la scène, clair rappel des éclairages du XVIIe siècle, suggèrent aussi un univers très «théâtral». Le décor plein de surprises achève d’installer la fantaisie. Comme dans certains livres pour enfants, sa forme se crée et se recrée dans le mouvement: les murs se déplacent, les éléments du décor se déplient, les accessoires, même, n’ont souvent que deux dimensions. Le décor devient ainsi un espace ludique à découvrir, fait de trappes, d’un arbre et d’un nuage de carton. Parfois un peu «pantins», les comédiens représentent, subtilement toutefois, chacun un des sept péchés capitaux. Parmi eux, Jacques Lessard et Lise Castonguay campent avec couleur un savoureux couple: Monsieur et Madame de Sotenville.
La mise en scène est inventive, le jeu, solide. Pourtant, résultat de cette mise en scène jouant constamment avec les frontières de la convention, aucun des personnages ne semble touchant, même si le drame d’Angélique et celui de George Dandin, quand on y songe, n’ont rien d’amusant.
Malgré tout le génie de Molière, il a peint ailleurs, avec plus de succès, les dboires du mari trompé par une épouse rusée: la pièce George Dandin n’est certes pas la mieux réussie de l’auteur. Toutefois, la mise en scène inspirée, le jeu à la fois sûr et plein de folie des comédiens et l’art des concepteurs méritent un détour, pour la fraîcheur qu’ils proposent.
Jusqu’au 11 mars
Au Théâtre de la Bordée