En dedans : En quête interne
Scène

En dedans : En quête interne

Après La Bête, GINETTE LAURIN aborde un univers totalement différent avec En dedans. La chorégraphe d’O Vertigo nous parle de cette oeuvre radieuse et  intimiste.

O Vertigo s’est toujours illustré par ces danseurs trop habiles pour être humains, ces mouvements trop parfaits pour être vrais. Avec En dedans, Ginette Laurin lève le voile sur certaines prouesses techniques. «Ma signature reste encore très dynamique, dit-elle, mais j’avais envie d’aller voir l’envers du décor.» Si la danse se fait moins vertigineuse, la pièce présente de nouveaux défis. «Ça joue plus sur la minutie et la concentration. C’est une autre sorte de virtuosité.»

La chorégraphe a été invitée à créer En dedans par la Ville de Munich à l’été de 1997 avec des danseurs de l’endroit. L’année d’après, elle a repris la chorégraphie avec sa propre compagnie. Laurin amorce chaque pièce d’une façon différente. Cette fois-ci, elle est partie d’un duo qu’elle a transformé, décomposé pour en révéler les détails. «Comme s’il y avait une caméra et qu’on avançait en close up sur le travail des partenaires. C’est de plus en plus intime et intérieur.» Les danseurs ont par exemple imaginé ce que deviendraient les mouvements chez une personne âgée ou encore si un des partenaires était aveugle. «J’ai trouvé que toute cette mécanique de la danse pouvait être très poétique parce que, je pense, chaque spectateur y trouve des références très claires. Comme donner la main, tenir la tête ou toucher le drap. On le voit dans différentes situations, ce qui fait que, sans s’en apercevoir, ce sont des gestes du quotidien qui s’intègrent et qui deviennent très touchants par leur simplicité.»

En reprenant cette pièce conçue pour d’autres, les danseurs d’O Vertigo ont travaillé particulièrement sur l’intériorisation du mouvement. Au lieu de le projeter, ils se concentrent à le sentir passer dans leur propre corps. «C’est ce qu’on remarque le plus, je pense: cette approche très intimiste et en même temps cette grande force qui se dégage du travail d’ensemble.» Les danseurs doivent, en effet, être très conscients les uns des autres et respirer à l’unisson pour se coordonner puisque la musique comporte peu de repères.

Pour demeurer dans le ton intimiste et refléter la sensualité qui se dégage de la danse, Carmen Alie et Denis Lavoie ont dessiné des vêtements d’intérieur. Les femmes sont en sous-vêtements et robes diaphanes, les hommes en camisoles et pantalons moulants. La légèreté des tissus renforce l’impression de flottement. Aucun décor: les éclairages de Hans Peter Boden suffisent à découper l’espace.

Contrairement à son habitude, la chorégraphe a dû utiliser une musique préenregistrée, puisqu’elle ne disposait que de deux mois pour monter la pièce à Munich. Elle a opté pour un montage regroupant 10 compositeurs contemporains différents dont les plus connus sont Arvo Pärt et Gavin Bryars. «Ce sont des musiques qui collent vraiment à la danse, qui sont là pour soutenir un rythme, ou parfois juste pour créer une ambiance de suspension.» Des pièces qu’elle nous assure faciles d’accès.

Ceux qui ont vu La Bête au Grand Théâtre il y a deux ans n’en retrouveront pas l’exubérance et la théâtralité. Ici, les danseurs ne jouent pas de personnage. Ce ne sont que des hommes et des femmes qui se rencontrent en couple ou en groupe. «\C’est une pièce qui est très harmonieuse, très sereine. Tout donne l’impression de flotter. C’est très radieux. Il y a beaucoup de douceur dans les rapports. Je pense que c’est dans ce sens-là qu’on a l’impression que le temps s’arrête.» Une oeuvre que la chorégraphe qualifie de yin pour la journée internationale des femmes? Pourquoi pas?

Le 8 mars
Au Grand Théâtre
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