Le 4e Round : Ceci n'est pas une pièce
Scène

Le 4e Round : Ceci n’est pas une pièce

Pour sa première pièce, Le 4e Round, le comédien autodidacte Philippe Ducros a voulu créer un show d’aventures proche de la bédé, «une histoire comme au cinéma» qui nous fait voyager à travers le monde, les cultures et les  religions…

Pour sa première pièce, Le 4e Round, le comédien autodidacte Philippe Ducros a voulu créer un show d’aventures proche de la bédé (il s’est inspiré d’une anecdote d’ Hugo Pratt), «une histoire comme au cinéma» qui nous fait voyager à travers le monde, les cultures et les religions… Beau programme! Malheureusement, Ducros nous perd un peu en cours de route. Si sa pièce déborde de flashs et de clins d’oeil amusants, elle n’a toutefois pas une structure dramatique assez solide pour soutenir les idées de l’auteur.

La soirée commence pourtant bien. Le spectateur gagne son siège alors que l’action est déjà amorcée. Le public est plongé dans l’atmosphère d’un match de boxe. Autour du ring, tout le monde s’affaire avant le combat «historique» entre l’Arménien Mardekian (Dany Michaud) et le Turc au nom allemand Keller (Richard Lemire).

Or, une fois le combat terminé, de boxe, il n’est presque plus question. (Bien que la métaphore du pugilat et de la haine demeure liée au récit.) On suit plutôt le périple de Mardekian au Moyen-Orient qui, soupçonné du meurtre de Keller, est devenu un fugitif. Les personnages nous conduiront dans de multiples lieux, d’Addis Abeba à Istanbul, en passant par New York. Il sera question de putes, de sorcellerie, du massacre des Arméniens, de Saint-Exupéry et de religions; un musulman dira même à Mardekian qu’il respecte le Jour du Seigneur (sic)?!?

À la fin, les deux pugilistes se retrouveront, par hasard, dans un hammam. Pas de chance, l’odeur du steak dans ce sauna nuit à la crédibilité de l’intrigue – dans une scène précédente, un dénommé Mustapha a fait cuire un steak, côté jardin, pendant que Mardekian fumait du hasch dans une pipe aussi grosse qu’un aspirateur…

Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple? Voilà un des problèmes de cette création éclatée autant dans son propos que dans sa forme. Il y a beaucoup trop d’éléments scéniques dans la mise en scène de Ducros, au détriment de la théâtralité de l’ensemble. Il abuse de la bande-son (les cris des mouettes dans le port, les gouttes d’eau en prison, les voix off), des changements de décors et de costumes (la scène dans le taxi new-yorkais est parfaitement inutile et fait penser à du sous-Robert Lepage).

Au bout du compte, Le 4e Round finit par ressembler à un charabia théâtral défendu par une distribution jeune et inégale. Soulignons quand même la belle fougue de Dany Michaud, la justesse du jeu de Patrice Dubois, et l’autorité scénique de Denis Lavalou.

Jusqu’au 25 mars
(Contribution volontaire le mardi)
À L’Espace Libre
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