Peines d’amour perdues : Mal d’aimer
Le Théâtre Denise-Pelletier semble se spécialiser cette année dans la production d’oeuvres méconnues et légères d’auteurs poids lourds. Comme si jeunesse devait être synonyme de mineur…
Le Théâtre Denise-Pelletier semble se spécialiser cette année dans la production d’oeuvres méconnues et légères, d’auteurs poids lourds. Comme si jeunesse devait être synonyme de mineur… Dans Le Menteur, la comédie de Corneille prenait au moins un coup de jeune, sous la direction dynamique et très fraîche de Martin Faucher. Rien de vraiment comparable ici, dans cette production, plutôt étrangère à la finesse et à l’esprit, de l’oeuvre de Shakespeare.
Écrite vers 1595, montée ici pour la première fois par des professionnels francophones, dans une traduction de Maurice Roy, Peines d’amour perdues table surtout sur le plaisir du langage – pour peu, bien sûr, qu’on sache le porter avec aisance…
Le prétexte à cette déclinaison sur tous les tons de serments amoureux? Un jeune roi et trois gentilshommes qui jurent de renoncer à tous les plaisirs, dont la douceur féminine, pour mieux se vouer à l’étude. Serment bien vite jeté aux orties, quand leurs yeux se posent sur les beautés de la princesse de France et des femmes de sa suite. Mais les dames font marcher les hommes, résistant à cet amour qu’elles croient frivole, tant il est enrobé d’ornements et paraît donc factice.
La direction de Manon Vallée, qui enseigne le théâtre au Cégep de Saint-Hyacinthe, insiste d’ailleurs lourdement sur le masque du langage, sur l’«aspect déguisement». Faut-il pour autant jouer de façon si bouffonne? Cette pièce, qui peut sûrement être charmante, prend souvent l’allure d’une farce peu subtile, où l’on télégraphie les changements de scène et les revirements par un coup de trompette… L’enflure ne se retrouve pas seulement dans les costumes fastueux d’Yvan Gaudin. Comme si la portion plus burlesque du texte (le conflit entre un «homme du peuple» et un Espagnol boursouflé incarné par Louis Champagne) avait contaminé le reste.
La mise en scène – le mot qui vient à l’esprit est «scolaire» – de Manon Vallée manque de grâce et de vivacité. Elle dirige une distibution, plutôt jeune, honnête au mieux, qui a la main lourde, au pire. Hormis peut-être Hélène Bourgeois-Leclerc, assez piquante.
L’enthousiasme des interprètes ne suffit pas à soutenir l’intérêt, et les multiples jeux de mots, qui semblent tourner à vide, finissent par lasser. Beaucoup d’efforts perdus, en effet…
Jusqu’au 8 avril
Au Théâtre Denise-Pelletier
Voir calendrier Théâtre