Steve Laplante : Le dur désir de créer
Scène

Steve Laplante : Le dur désir de créer

L’espace de deux spectacles, Steve Laplante est devenu l’alter ego scénique du metteur en scène Wajdi Mouawad. Dans Rêves, il incarne le protagoniste, un auteur qui s’isole dans une chambre d’hôtel pour tenter d’écrire l’histoire d’un personnage marchant jusqu’à la mer.

Depuis sa sortie de l’École nationale de théâtre, en 96, Steve Laplante a exploré en long et en large la planète Wajdi Mouawad. Sous la rubrique «théâtre» de son C.V., outre les comédies légères que le comédien signe lui-même (dont la savoureuse Entre-deux), on ne retrouve que les pièces écrites par le nouveau directeur du Quat’Sous. L’aventure, commencée avec le rôle principal de Littoral, qui a mené la gang du Théâtre Ô Parleur très loin des rivages montréalais, s’est poursuivie avec Willy Protagoras, Les Mains d’Edwige, puis avec Rêves, crée l’an dernier au Festival de théâtre des Amériques, et reprise en avril, dans une version remaniée, sur la scène du théâtre dirigé par Mouawad. Le jeune comédien n’a jamais eu besoin de se demander, contrairement à plusieurs de ses collègues, de quoi demain serait fait.
«Quand j’ai rencontré Wajdi à l’École, se souvient Steve Laplante, ç’a cliqué tout de suite. Il a beaucoup influencé ma vision du théâtre, qui se construit depuis quatre ans. Il y a une espèce de rythme dans ses shows qui m’est rentré dans la tête. Ce rythme-là amène une spontanéité.»
L’espace de deux spectacles, Steve Laplante est devenu en quelque sorte l’alter ego scénique du metteur en scène. C’est le cas dans Rêves, où il incarne le protagoniste, un auteur qui s’isole dans une chambre d’hôtel pour tenter d’écrire l’histoire d’un personnage marchant jusqu’à la mer. Entre les constantes interruptions du réel, soit l’hôtelière esseulée (Hélène Loiselle), les personnages peuplant son imaginaire envahissent la chambre… «Je commence à comprendre qu’il faut vraiment que je m’inspire de Wajdi, note le comédien. C’est délicat: il ne faut pas que je joue Wajdi, mais que je m’inspire de ses attitudes, sans les copier.»
Moins marqué par l’humour et le rythme bédéesques que les autres shows de Mouawad, Rêves explore l’importance de l’acte de création, un besoin «vital» pour le personnage. «Ce que j’aime beaucoup du théâtre de Wajdi, c’est qu’il a n sens du sacré très fort. Ça me parle beaucoup, cette idée qu’on n’est pas là pour rien, que c’est important ce qu’on fait; c’est peut-être un peu naïf, mais je crois qu’on peut changer le monde. En même temps, j’adhère aussi à l’autre discours, affirmant que si le public s’en souvient deux jours après, c’est un gros hit. C’est un peu paradoxal…»
Rêves devrait être la dernière pièce de Wajdi que Laplante va jouer «pour un bout». En juin, le coeur gros, il dira adieu, du moins pour le moment, à Littoral. Pour l’an prochain, il a d’autres projets, qui l’éloigneront des univers «mouawadiens» qu’il a côtoyés jusqu’ici. «C’est super intéressant: il y a plein de choses qui se recoupent dans les textes de Wajdi. En quatre ans, et surtout avec Rêves, je sens vraiment qu’on a pu creuser son univers. Mais c’est sûr que j’ai besoin de travailler avec d’autres gens. Juste pour se ressourcer.»
Au fil des ans, le comédien s’est construit «une petite confiance». En voilà un pour qui la création a changé, concrètement, la vie. «Moi, je me suis mis à me poser de vraies questions depuis que je fais du théâtre. Quand je suis entré à l’École, j’ai tout remis en question: ma vie familiale, mon passé, ce que je voulais faire dans la vie, tout. Je m’enlignais pour une petite vie rangée. Je viens de Drummondville, ça va me suivre toute ma vie… (rires) J’étais dans un milieu où tout le monde avait l’oeil sur l’avenir: dans cinq ans, je vais avoir ma maison, ma blonde, mes deux enfants… Et de débarquer dans le milieu théâtral, ça a beaucoup changé mes priorités. Je sens que je suis à la bonne place, avec le bon monde. Je suis bien là.»

Du 3 avril au 6 mai
Au Théâtre de Quat’Sous
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